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L’Etna, le Vésuve, dans leurs éruptions, ne produisent pas de désastres plus terribles. » De tels récits, où l’exagération des narrateurs est d’autant plus grande que, n’ayant pas été témoins des faits, ils s’en rapportent à des récits amplifiés déjà, nous montrent pourtant que des phénomènes très curieux ont dû se produire à cette époque à la salze de Sassuolo. Vallisneri, à la fin du xviie siècle, a visité ces lieux, et sa description indique qu’au moment de son exploration la salze était dans un état de tranquillité relative. « Elle bouillonnait, dit-il, continuellement et rejetait par une bouche d’environ 2 pieds de diamètre une petite quantité d’eau salée mêlée avec du limon imprégné de pétrole noir et fétide. »

En 1789, Spallanzani, après une excursion à Sassuolo, raconte que la salze se présente sous la forme d’un cône terreux haut de 2 pieds, terminé par un entonnoir de 1 pied de diamètre, d’où sortent par intervalles des bulles de 4 ou 5 pouces de diamètre, qui, à peine formées, éclatent et disparaissent. Ces bulles soulèvent une terre argileuse grisâtre, imprégnée d’eau, semi-fluide, qui déborde au-dessus de l’entonnoir et coule le long des parois extérieures. Les éruptions paraissent très faibles en comparaison de celles qui étaient survenues dans les temps passés : ces dernières avaient fourni de longues coulées de boue ; elles occupaient une aire d’environ trois quarts de mille de tour… La tranquillité de la salze ne laissant plus rien à observer, Spallanzani interroge les habitans d’une maison voisine pour en obtenir quelques informations sur les circonstances qui accompagnent les éruptions. « Il y a trois ans, lui disent ces gens, que nous en vîmes éclater une très forte ; le petit cône de terre disparut, et à sa place s’éleva tout à coup une grosse tumeur de fange très molle. Bientôt cette tumeur se creva avec un bruit semblable à un petit coup de canon ; au même moment, une grande quantité de terre accompagnée de fumée fut lancée très haut dans les airs. Un moment après se forma une autre tumeur qui, crevant avec le même bruit, projeta dans l’air une aussi grande quantité de terre ; il en fut de même des explosions suivantes, qui se succédèrent à intervalles à peu près égaux. La crise dura trois heures ; après quoi les tumeurs et les jets de terre diminuèrent peu à peu, et, au bout de quelques jours, la salze revint à son premier état. »

Spallanzani fit une deuxième excursion à Sassuolo le 12 juillet 1790. Quelques semaines auparavant, la salze avait eu une nouvelle éruption. Le cône tronqué qui en occupait le centre avait alors 4 pieds de hauteur et 11 de large à sa base. Il présentait intérieurement une cavité évasée vers le haut, d’où sortaient des bulles de gaz qui éclataient avec un bruit sourd au travers d’un limon aqueux