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toujours développée spontanément, et qui, à toutes les invasions du mal dans nos contrées, en a été le principal propagateur. Tous les hommes qui ont étudié la peste bovine ont reconnu qu’elle ne doit pas être attribuée aux causes qui produisent ordinairement les maladies sur les animaux dans nos pays. Comment, se demandait Vicq-d’Azyr, la même maladie se déclarerait-elle en même temps, avec une intensité marquée dans les symptômes, avec une terminaison semblable dans la crise, avec les mêmes dangers et les mêmes phases, non-seulement en France dans les provinces méridionales et dans les généralités d’Amiens, de Soissons, de Flandre et de Champagne, mais encore en Hollande, en Danemark, en Islande et en Norvège, et comment se serait-elle montrée toujours la même dans des circonstances si différentes, si elle dépendait uniquement de changemens opérés dans les choses naturelles, et si un virus bien décidé n’en était pas le véhicule et le ferment ? Da-Olmi pensait aussi que l’épizootie n’est due ni à la constitution des animaux de nos pays, ni à leur nourriture, ni à l’atmosphère, que les météores et les saisons peuvent bien influer sur la marche rétrograde ou progressive de l’épizootie, mais ne peuvent en être considérés comme la cause primitive.

On ignore quel principe la fait se développer là où elle vient spontanément, là où elle est à l’état enzootique ; ce qu’on sait très bien, c’est que dans nos contrées elle est constamment produite par la contagion. Ce caractère n’avait pas échappé aux deux médecins qui l’ont observée les premiers dans les temps modernes. Ramazzini et Lancisi, qui l’ont étudiée en Italie, disaient : le premier, que, quel que soit le germe de cet affreux fléau, il ne peut pas y avoir de doute sur sa nature virulente, — le second, qu’elle est due au transport des germes d’un individu malade à un individu sain, et que c’est à cette seule communication qu’il faut s’en prendre pour en arrêter les progrès. Vicq-d’Azyr, Paulet, Buniva, professaient les mêmes doctrines ; mais Huzard, Rodet, Hurtrel d’Arboval, Delafond, ont soutenu « qu’elle peut naître spontanément sur les bêtes à cornes dans toutes les contrées lorsqu’elles sont exposées aux causes qui en suscitent le développement sur les bœufs hongrois. »

Ce qui a fait émettre cette dernière opinion, c’est d’abord qu’on a quelquefois pris pour la peste bovine des affections très graves, la fièvre charbonneuse par exemple, qui se déclare assez souvent sous forme épizootique chez les bestiaux mal nourris, exténués de fatigue et réunis en grand nombre dans des lieux malsains ; c’est ensuite qu’il n’a pas toujours été possible de constater par quelle voie ni de quelle manière s’était effectuée la contagion ; c’est en troisième lieu parce qu’on a pu remarquer quelquefois qu’elle ne sévissait pas en