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comme autour d’un centre naturel, ils en sont réduits à prendre pour roi, après la mort de Louis III et de Carloman, Charles le Gros, déjà empereur, roi de Germanie et d’Italie. Cette situation fausse et contradictoire qui de nouveau réunissait sous un même sceptre la Gaule et l’Allemagne ne pouvait qu’être temporaire. C’est sur ces entrefaites qu’a lieu la rentrée en scène de cette famille dont Robert le Fort est ! e premier ancêtre connu. Le duc de France avait laissé deux fils, Eudes et Robert. Toutefois, comme ceux-ci étaient encore en bas âge, le duché avait été donné à Hugues l’abbé ; mais le sang de Robert coulait dans les veines de ses enfans. En 884, Eudes, déjà illustre pour sa bravoure, est nommé par Charles le Gros comte de Paris. Dès ce moment, il appartient à l’histoire, qui doit enregistrer tous ses actes. Ainsi, pour la deuxième fois en vingt ans, les Carlovingiens élèvent la fortune de ces soldats nationaux destinés à les remplacer sur le trône de France. Bientôt éclate, avec le démérite des césars germains, la valeur toute française des fiers aïeux de Capet. À la fin de novembre 885, des bandes formidables de Normands remontent la Seine et mettent le siège devant Paris. Qui sauve la ville ? Eudes, fils de Robert. Les habitans déployèrent d’ailleurs pendant plusieurs mois une admirable constance ; les Parisiens firent dans cette lutte l’apprentissage de cet héroïsme qu’ils devaient transmettre à leurs descendans les plus reculés : leur cité mérita de devenir et de rester la capitale de la France future. — Quant à Charles le Gros, il était demeuré à Metz dans l’engourdissement d’une molle indolence. Enfin tardivement il quitte l’Austrasie pour venir au secours de Paris ; mais, au lieu d’écraser les Normands, ce qui lui était chose facile avec les forces supérieures de l’armée impériale, il négocie avec eux et achète la paix. Après cet exploit, Charles le Gros, comme pour mettre mieux en relief sa nullité solennelle, achève d’appeler sur Eudes l’attention des féodaux en investissant le héros de Paris de ce grand commandement entre Seine et Loire qu’on avait déjà institué pour Robert le Fort. À quelque temps de là, cet empereur sans courage fut déposé par les Germains, qui prirent pour roi Arnulf de Carinthie. Avec lui tomba définitivement l’empire carlovingien, dont les débris formèrent huit royaumes ; mais, on va le voir, la dynastie austrasienne n’était pas encore expulsée de France.

Quelle part ce nouveau démembrement laissait-il à ce dernier état ? Ce qu’il nous importe surtout de savoir ici, c’est qu’à l’est la France reprenait les étroites limites du traité de Verdun, c’est-à-dire les frontières du Rhône, de la Saône, de la Meuse et de l’Escaut. La Lorraine était érigée en un royaume intermédiaire sous le sceptre de Zwentibold, fils naturel d’Arnulf ; elle s’ouvrait donc