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l’établissement de taxes, d’abord pour leur servir de garantie et en assurer le placement, ensuite comme remède moral non moins que comme remède financier. La ville de Paris reprendra d’autant plus vite sa marche progressive qu’elle aura payé plus chèrement le retour au bon ordre et au bon sens.

Quoiqu’il n’entre pas dans notre pensée aujourd’hui de parler des modifications que le régime municipal vient de subir, et que nous avons si souvent provoquées, nous devons constater que le fonctionnement de ce régime même hâtera plus ou moins les améliorations financières, objet des vœux universels. Composé de quatre-vingts membres, en vertu d’un système de vote proposé par M. Say à l’assemblée nationale, le nouveau conseil a trompé toutes les prévisions ; il en arrive ainsi toutes les fois qu’on veut chez nous combiner le fonctionnement du suffrage universel en vue d’un but politique. On se flattait que l’élection d’un conseiller par quartier ferait surgir partout des candidatures notoires dans un sens ou dans un autre, que, sous le coup des catastrophes récentes, tous ceux qui ont intérêt à la reprise des affaires viendraient prendre part au vote, et choisiraient des hommes bien connus par les antécédens laborieux, la position, le savoir et le talent. Or ce qui a dû frapper le plus a été d’une part une désertion coupable du scrutin, et de l’autre le défaut de notoriété des élus. Les électeurs qui appartiennent au parti du désordre ont nommé leurs chefs, donnant ainsi une leçon nouvelle à leurs adversaires ; mais ceux-ci n’ont choisi pour la plupart que des candidats non-seulement sans signification politique, mais presque sans signification locale.

Faudrait-il conclure du caractère un peu effacé du nouveau conseil à une conduite plus réservée ? Oui, jusqu’à présent. Le vote de l’emprunt a été unanime ; les discussions qui l’ont précédé ont donné le spectacle d’une assemblée remarquable par la modération et la tenue. Attendons toutefois une seconde épreuve. Le conseil a siégé en session extraordinaire, et n’a traité qu’un sujet spécial sur lequel il n’y avait pas deux partis à prendre. Une dette étant reconnue, et celle de la ville ne pouvait pas ne point l’être, il fallait décider qu’on la paierait, et, comme on n’avait pas d’argent, en demander à autrui, emprunter. Vienne la session ordinaire, dans laquelle les vœux politiques pourront être émis et soutenus, ce calme, cette sagesse ne se démentiront-ils pas, au grand détriment des affaires publiques ?

Nous verrons bien alors si nous avions raison autrefois de demander pour les élections communales à Paris d’autres conditions que pour les élections politiques, et de redouter, dans les premières, l’exercice du suffrage universel tel qu’il était établi. Nous convenons que la nouvelle loi municipale a satisfait en partie à ces