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d’ailleurs celle qui a précédé le concordat lui-même. Voici l’article :

« Art. 6. — Les évêques, avant d’entrer en fonctions, prêteront directement, entre les mains du premier consul, le serment de fidélité qui était en usage avant le changement de gouvernement, exprimé dans les termes suivans :

« Je jure et promets à Dieu, sur les saints Évangiles, de garder fidélité au gouvernement établi par la constitution. Je promets aussi de n’avoir aucune intelligence, de n’assister à aucun conseil, de n’avoir aucune ligue, soit au dedans, soit au dehors, qui soit contraire à la tranquillité publique, et, si dans mon diocèse ou ailleurs j’apprends qu’il se trame quelque chose au préjudice de l’état, je le ferai savoir au gouvernement. »

« En présence d’un pareil article, ajoutai-je, je ne puis considérer la prétention des trois évêques que comme une lubie sans conséquence, qui tombera d’elle-même devant la désapprobation du corps épiscopal, s’il est mis officieusement en demeure de se prononcer, et à plus forte raison devant le saint-siège, si nous en étions à réclamer son intervention, comme au temps du ministère Martignac, et à propos des fameuses ordonnances signées par le roi Charles X en 1828. Nous serions ici beaucoup plus forts, ayant pour nous le concordat textuel, et n’ayant contre nous qu’une fraction minime de l’épiscopat. Je suis convaincu que cette fois la simple menace d’en venir à cette extrémité suffira. Laissez-moi revoir et pérorer mes contumaces ; mais en attendant ne compromettez pas ma besogne, et n’échauffez pas les esprits.

« Je revis les trois évêques ; je remis l’article du concordat sous leurs yeux, et je les pressai de s’expliquer sur le motif de leur refus. Ce motif, ils me le déclarèrent en toute sincérité ; il répugnait à leur conscience de s’engager, envers un gouvernement nouveau et qui ne leur inspirait pas confiance, à l’informer de ce qui viendrait à leur connaissance au préjudice de l’état.

« J’entrai dans leur idée. J’admis sans difficulté que la clause dont il s’agissait avait quelque chose de suspect et de regrettable, mais en leur faisant observer qu’il ne dépendait pas de nous de modifier ce texte du concordat ; j’ajoutai que tout dépendait néanmoins du sens que le gouvernement y prétendait attacher, et que je prenais sur moi de leur garantir que le gouvernement, en leur imposant un serment de date presque immémorable, ne leur demandait rien d’autre ni de plus que ce qu’il exige et ce qu’il est en droit d’exiger de tout Français exerçant une fonction publique :

« Fidélité au roi, obéissance à la charte constitutionnelle et aux lois du royaume.

« Il était, dis-je, bien loin de notre pensée de transformer les