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pas et perdit la bataille de Valmy. Après la sanglante affaire d’Arcis-sur-Aube (20 et 21 mars 1814), Napoléon, ne pouvant arrêter la marche des alliés sur Paris, avait pris la résolution de laisser la route libre et de se porter sur Saint-Dizier et sur Metz pour couper la ligne d’opérations de l’ennemi, et il disait : « Que Paris se défende seulement quelques jours, et pas un étranger ne repassera le Rhin. » Quant à la durée probable de la résistance de Metz, loin d’avoir dit que la place ne pourrait tenir que quinze jours sans la protection de l’armée, j’ai toujours soutenu l’opinion contraire. Ce qui a pu propager l’erreur, c’est que plusieurs officiers pensaient que nos forts, très imparfaits, ne pourraient résister plus de quinze jours.

M. Mézières dit, page 417, que, dans l’affaire de Sainte-Barbe, qui eut lieu le 30 août et le 1er septembre (trois jours après la réunion de Grimont), « le maréchal livra le combat sans se croire obligé à de grands efforts : depuis que le conseil de guerre avait exprimé le vœu que l’armée fût maintenue sous les murs de Metz, la responsabilité personnelle du maréchal Bazaine était officiellement dégagée ; rien ne l’obligeait plus à partir ; il pouvait toujours se retrancher derrière l’opinion de ses subordonnés. » Ceci est une erreur, car les règlemens militaires ne reconnaissent pas ce soi-disant conseil de guerre. Un général en chef est toujours libre de consulter qui bon lui semble, mais sa responsabilité personnelle est toujours entière, et son commandement absolu. Dans tous les cas, le maréchal ne pouvait se dispenser de faire des efforts, puisque le conseil des généraux avait posé en principe qu’il fallait agir très énergiquement contre les Prussiens.

A la page 425, M. Mézières dit que le général Boyer fut envoyé à Versailles après une délibération d’un conseil de guerre où l’on décidait à l’unanimité que l’armée tiendrait sous les murs de Metz jusqu’à l’entier épuisement de ses vivres, qu’elle ne ferait plus d’opérations autour de la place, et qu’on entrerait en pourparlers avec l’ennemi pour traiter d’une convention militaire. M. Mézières ajoute que je proposai de tenter le sort des armes, et que cette proposition fut repoussée. — Malgré le soin qu’il a mis à rechercher la vérité, M. Mézières a été imparfaitement renseigné sur le résultat du conseil tenu le 10 octobre. Il n’a pas été dit que l’armée tiendrait sous les murs de Metz jusqu’à l’entier épuisement des vivres, et qu’on ne ferait plus d’opérations militaires ; le vœu exprimé par le conseil d’envoyer le général Boyer à Versailles n’a pas été pris à l’unanimité, puisque j’ai combattu ce projet justement par les raisons que M. Mézières développe lui-même dans la suite de son récit. On a discuté et repoussé la proposition que j’avais faite de recourir à une lutte suprême : mais ce projet fut plutôt ajourné que repoussé complètement, puisqu’il fut convenu que, si les conditions acceptées par l’ennemi n’étaient pas parfaitement honorables, on livrerait un combat