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compagnie de Fresnes-Midi. En 1841, Fresnes-Midi voulut s’établir à la droite de l’Escaut, sur les limites de la concession de Fresnes et sur un terrain qu’Anzin soutenait lui appartenir d’après des titres inattaquables. Fresnes-Midi contesta d’abord ces limites, puis, négligeant et abandonnant cette prétention, se rejeta sur la concession de Condé et Vieux-Condé, et y ouvrit des puits, alléguant que le droit de haute justice de M. de Croy, origine du droit d’exploitation d’Anzin, ne s’étendait pas sur toute cette ancienne seigneurie. Évidemment on ne cherchait qu’une chicane, bonne ou mauvaise ; il fallut plaider. Cette fois, le conseil d’état, réglant mieux ses juridictions, renvoya devant les tribunaux ordinaires la question de l’étendue des droits des sieurs de Croy comme haut-justiciers. L’affaire parcourut tous les ressorts, dont les sentences furent invariables : le tribunal de première instance de Valenciennes, la cour d’appel de Douai, la cour de cassation enfin, donnèrent gain de cause à la compagnie d’Anzin, qui fut confirmée dans son droit sur la concession de Condé et Vieux-Condé, comme elle l’avait été sur toutes les concessions qu’on lui avait disputées. Fresnes-Midi fut condamnée à fermer les puits ouverts sur un terrain qui ne lui appartenait pas. Entre voisins, il n’y a que des trêves plus ou moins longues ; vingt-deux ans plus tard, en 1863, la même compagnie de Fresnes-Midi suscite à Anzin une autre querelle, puérile dans ses motifs, grave dans le tour qu’elle prit, sur la propriété de la concession de Fresnes. Pour ce dernier effort, les agresseurs croyaient avoir mis dans leur jeu tout ce qui devait le faire réussir ; cette confiance expliquait seule leur audace. Ils s’attaquaient au premier siège de la compagnie d’Anzin, à l’un des centres les plus actifs de ses établissemens, couvert de ses constructions, labouré dans les profondeurs du sol par ses galeries souterraines ; comme si tout cela n’eût pas existé, comme s’il se fût agi d’une lande nue, d’un terrain sans maître, ils en demandaient la concession au gouvernement. Ils allaient plus loin : ils affichaient la demande sur les murs mêmes des possesseurs, dans l’enceinte de la possession. A quel titre ? En se fondant sur un incident sans valeur, une concession faite en 1757 au prince de Croy pour trente années, qui, expirée en 1787, avait dû laisser depuis lors une vacance ouverte, — subtilité de procédure qui tombait à néant devant les termes d’une concession postérieure faite en 1759, devant un contrat d’union qui avait confondu tous les droits, devant les délimitations de la loi de 1791 qui formait un nouveau titre, devant la loi de 1810 qui absorbait dans une propriété définitive toutes les jouissances temporaires, enfin devant une possession et une exploitation plus que séculaires, consacrées par des actes d’une