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Ils venaient de se former en synode lorsque le comte Candidien se fit annoncer et parut avec ses gardes. Il leur exposa plus en détail que n’avait fait Irénée les événemens de ces derniers jours. Appuyant sur l’énergie qu’il avait déployée en face d’une assemblée séditieuse, sur la façon brutale dont elle avait congédié un représentant de l’empereur, Candidien prenait ses précautions pour que les Syriens ne l’accusassent pas trop de mollesse et d’incapacité dans le rapport qu’ils adresseraient à l’empereur. On l’invita, comme avait fait le conciliabule de Cyrille, à donner communication de la lettre sacrée qui contenait ses instructions ; il y consentit cette fois sans difficulté, et les pères orientaux, après en avoir entendu la lecture debout, saluèrent par de longues acclamations le nom du religieux empereur. Jean, prenant alors la parole, demanda au comte Candidien si les règles ecclésiastiques avaient été observées dans toute cette procédure de l’assemblée de Cyrille. « Pas plus que la volonté du prince, » répliqua Candidien, et parcourant des yeux le synode : « j’aperçois dans cette enceinte, continua-t-il, des évêques qui vous le témoigneront comme moi. » Après ces mots, son escorte et lui sortirent. Il venait à peine de quitter la salle que les députés du concile de Cyrille demandèrent à être entendus. Ils avaient suivi à pied, confondus dans la foule, les Orientaux gagnant leur logis, et ils stationnaient depuis une heure et plus à la porte, attendant qu’on voulût bien les introduire. Admis dans la salle, ils se mirent en devoir d’accomplir leur mission, qui était d’exposer que, Nestorius ayant été bien et dûment condamné à la déposition, le concile avertissait les évêques d’Orient et leur patriarche de ne point communiquer avec lui sous les peines établies par l’église. Ils n’eurent pas le temps d’en dire davantage. « Je sais tout cela, s’écria Jean avec impatience, retournez vers ceux qui vous ont envoyés. » Les députés se retirèrent, et, comme ils sortaient de la maison, ils furent bousculés par les soldats et battus par les valets syriens, de telle sorte qu’ils ne parvinrent qu’à grand’peine à l’église de Marie, où leur assemblée siégeait.

Cependant le synode des Orientaux continuait son enquête sur les événemens d’Éphèse. Jean invita les évêques alors présens dans la ville à faire leur déposition ; Théodoret était du nombre, ainsi que nous l’avons dit, et se montra fort animé. Les intentions de Cyrille furent alors mises à nu. Bien évidemment il ne s’était hâté de faire condamner Nestorius avant l’arrivée des Orientaux qu’afin de prévenir sa propre mise en accusation comme auteur des anathématismes, le procès de l’archevêque de Constantinople étant une occasion naturelle d’examiner ce document, si considérable dans l’affaire, et les Orientaux y trouvant une occasion que Jean d’Antioche et surtout Théodoret se proposaient ardemment de saisir.