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l’industrie agricole ; 2° les produits nets des offices ministériels et des autres professions libérales ; 3° les pensions, traitemens, rémunérations pour services publics et privés, sous quelque titre, forme ou dénomination que ce soit, à l’exception des salaires d’ouvriers proprement dits ; 4° les produits des capitaux placés, sous forme de dividendes, rentes, annuités, intérêts de créance. Chacune de ces branches était taxée à 3 pour 100. On peut accepter ou non cette classification lorsqu’il ne s’agit que de l’impôt partiel ; mais à quoi irait-elle, à quoi irait surtout cette exemption en masse de tous les salariés urbains et ruraux, s’il s’agit d’un l’impôt unique ou prédominant ? Oublie-t-on que parmi ces salariés il y en a de beaucoup mieux rétribués que tel petit entrepreneur, traité en privilégié du capital ? Ce que leur nombre ajoute à l’impôt dans le système actuel est énorme. De même on peut se résigner peut-être, pour cet impôt simplement ajouté aux autres, à ce que des revenus aussi différens soient sujets à la même taxe. Dans un système général ce serait d’une injustice évidente, et il faudrait en venir à des exemptions ou à des atténuations. On ne saurait imposer également les revenus certains et les revenus aléatoires. Comment y remédier ? comment tenir compte de degrés qui vont à l’infini ? Un économiste anglais, M. Mac-Culloch, proposait de taxer les revenus viagers d’après la vie probable ; ainsi l’homme de soixante ans devait payer moins. M. J. Stuart Mill, même dans le système de l’impôt purement partiel, exempte de la taxe une partie de certains revenus ; les uns ne paient que pour moitié, les autres pour trois quarts. Ne s’expose-t-on pas, en ayant recours à ces arrangemens d’une application fort délicate, à tomber bien des fois dans l’arbitraire par les efforts même si compliqués qu’on fait pour éviter l’arbitraire ? C’est un mérite des taxes de consommation que celui qui ne possède qu’un revenu aléatoire peut convertir en épargne cette part de revenu qu’il n’a pas dépensée. Que si cette épargne elle-même n’est point trop taxée, tout sera dans l’ordre. Une taxe placée uniquement sur le revenu, ne tenant compte ni de la quantité des consommations, ni des sacrifices et des privations qu’on s’impose, serait infiniment plus dure pour le petit contribuable que le système actuel et plus défavorable à l’épargne. C’est encore M. John Stuart Mill qui le dit en des termes qui me paraissent irréfutables : « La manière la plus convenable d’asseoir l’impôt du revenu serait d’imposer seulement la portion des revenus qui est destinée à la consommation et d’exempter celle qui est épargnée. En effet, une fois épargnée et placée, toute somme produit un revenu ou des profits qui paient l’impôt, bien que cette somme l’ait déjà payé. Si donc l’on n’affranchit pas’les épargnes de l’impôt du revenu, les contribuables sont imposés deux fois sur ce qu’ils économisent, et une fois seulement