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d’Éphèse, sous lequel il est inscrit dans l’histoire. Dioscore s’embarqua ensuite pour Alexandrie, où il fit une entrée triomphale, rapportant pour dépouilles opimes de sa campagne, outre la mort du patriarche de Constantinople, la déposition de celui d’Antioche. L’église d’Orient était tout entière sous ses pieds, et il pouvait prendre le titre d’archevêque universel qu’un évêque d’Asie avait osé lui donner en plein concile ; mais la justice de Dieu ne dormait pas. Un troisième acte se préparait comme dénoûment du sombre drame dont nous avons raconté les deux premiers, c’était Dioscore devant le concile de Chalcédoine.

Chrysaphius se hâta de faire confirmer par l’empereur les résultats du brigandage d’Éphèse, et une loi de Théodose, rendue peu après la clôture de ce faux concile, ajouta aux sévices ecclésiastiques la persécution civile. La déposition des évêques Eusèbe, Domnus et Théodoret était nommément approuvée, et leur bannissement prononcé avec interdiction du feu et de l’eau non-seulement contre eux, mais contre ceux qui communiqueraient avec les condamnés. La même loi établissait l’assimilation de doctrines entre Nestorius et les déposés d’Éphèse. Théodose signa sans doute cette odieuse loi avec satisfaction, comme une preuve de sa clairvoyance théologique et de son orthodoxie ; mais sa joie ne dura pas longtemps, et la mort le frappa inopinément le 28 juillet de l’année suivante.

Un jour qu’il était allé chasser aux environs de Constantinople sur les bords d’une petite rivière appelée Leucé, c’est-à-dire la Blanche, son cheval emporté l’y précipita, et il se fracassa en tombant l’épine dorsale. On le mit dans une litière, et on le ramena ainsi au palais, où il mourut la nuit suivante. Pulchérie, rappelée en toute hâte de l’Hebdomon, assistait à ses derniers momens ; elle le fit déposer le 30 juillet au tombeau d’Arcadius, leur père, dans la galerie méridionale de l’église des Apôtres. Ce faible empereur, auquel les Grecs ont donné le titre de pieux ou dévot, mais dont la manie théologique fut un fléau pour son empire, finit dans la cinquantième année de son âge, après avoir régné quarante-deux ans et près de trois mois depuis la mort de son père, et un peu plus de quarante-huit ans depuis qu’il avait reçu le titre d’auguste. Sa mort laissa les rênes de l’empire aux mains de Pulchérie Augusta.


AMEDEE THIERRY.