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salaire total pour une année s’élèverait à environ 850 millions. En y joignant les domestiques attachés à l’agriculture, environ moitié du nombre des journaliers, et en comptant leurs salaires au même taux, on arrive au chiffre de 1 milliard 275 millions payés par l’agriculture. Que sera-ce, si on se rend compte des valeurs représentées par le travail industriel ? Le recensement officiel de 1851 porte le nombre des ouvriers mâles dans l’industrie et le commerce à 2,109,000, et celui des ouvrières à 2,261,000. En comptant le salaire moyen des hommes à 2 francs 50 cent., ou, pour 300 jours de travail, à 750 fr. par an, et celui des femmes à 1 fr. par jour, ou 300 fr. par an, le total des salaires payés par l’industrie et le commerce s’élèverait à 2 milliards 200 millions. Au total, on trouve le chiffre considérable, tant en lui-même que par rapport aux profits, de 3 milliards 535 millions, comme représentant la part du travail manuel. Et c’est cette énorme portion de la fortune publique que l’on exempte, comme si tous les salaires se rapprochaient du chiffre moyen, et comme s’il n’y en avait pas de beaucoup plus élevés ! Ajoutons environ 900 millions représentés par les rétributions du travail intellectuel. Il est vrai que, pour le travail intellectuel, le revenu offre généralement plus de prises au minimum proposé. Avec une taxe qui ne serait pas une simple superposition, un double ou triple emploi, de telles anomalies et de telles lacunes disparaîtraient.

Le projet taxe de même d’une façon Uniforme à 2 pour 100 les traitemens et pensions au-dessus de 1,500 francs, tandis que les bénéfices de l’industrie et du commerce sont taxés à 3 pour 100, C’est assez arbitraire : ou bien il faut taxer davantage les gros appointemens, ou bien il faut taxer moins les petits bénéfices ; le mieux serait d’établir entre ces deux sortes de revenus l’uniformité, Au reste, ce qui se rapporte aux retenues de traitement sous le nom d’impôt ne donnerait pas lieu à moins de réflexions tant à propos de ceux qu’on exempte qu’à propos de ceux qu’on taxe. Sans entrer dans un tel détail, n’y aura-t-il pas toujours quelque chose d’un peu singulier dans ces opérations où l’état retient après avoir donné, malgré l’axiome juridique ? Les traitemens étant censés établis sur le principe d’une rémunération estimée rigoureusement juste, pourquoi, peut-on demander, en retrancher une partie après coup ? il est vrai que cette dernière objection n’est guère facile à éviter avec un système un peu général de taxes mises sur le revenu. Les traitemens ont beau être fixés par l’état sur les besoins présumés et les services rendus, on les assimile aux salaires ou aux bénéfices. Pourtant une étude plus complète de la manière dont on a distingué dans la plupart des états, allemands l’einkommensteuer et la classemteuer apprendrait à résoudre d’une manière