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servent à couvrir des cases ; jeunes et tendres, elles donnent une matière textile employée à confectionner des pagnes, des lambas, des nattes, des corbeilles ; naissantes, elles fournissent une excellente nourriture. De l’intérieur du tronc, on tire cette fécule connue de tout le monde sous le nom de sagou. D’autres palmiers à longues feuilles pennées, les arecs[1], sont aussi fort communs dans les parties chaudes et humides de Madagascar : groupés en masses touffues, ils parent d’une façon charmante la vallée que traverse l’Iarouka ; ainsi que le chou palmiste des Antilles, qui est, sinon du même genre, du moins du même groupe, ils ont des bourgeons très recherchés comme aliment,

À l’entrée des bois, près de Foulepointe, de Tamatave ou de la région des lacs, d’Ivondrou à Andouvourante, à côté des fougères, des cycas, des raphias, comme en divers endroits sur les sables des bords de la mer, se montrent communément des strychnos ; les graines vénéneuses, fournissant l’alcaloïde qu’on appelle la strychnine, les ont rendus célèbres ; le nom est connu de tout le monde. Plusieurs de ces végétaux sont répandus dans l’Inde, aux îles de la Sonde, aux Philippines. Sur la Grande-Terre, outre une espèce sans doute d’origine indienne, qu’il ne faut pas distinguer du strychnos des buveurs, dont les graines ont la propriété de clarifier l’eau trouble, existe en abondance le strychnos vontac, arbre rameux haut de 3 à 4 mètres, portant des fruits de la grosseur des coings, revêtus d’une enveloppe dure, ayant une chair de saveur douce très prisée des Malgaches. En considérant les vontacs ou d’autres arbres de la lisière des forêts, si la saison est propice, l’explorateur s’arrêtera, peut-être en extase devant un spectacle saisissant et inattendu. Sur de vieux troncs, sur quelque souche pourrie, retombant suspendues à de longues tiges de grandes fleurs qui sont du nombre des plus belles et des plu ? étranges : des orchidées du genre des angrecs que notre botaniste Du Petit-Thouars fit connaître au commencement du siècle. Sous les couverts semblent se cacher l’angrec éburné et l’angrec superbe, tandis qu’au grand jour, au plein soleil, là où les arbres sont clair-semés, s’offre aux regards la plus extraordinaire orchidée du genre[2]. La plante s’empare à la fois d’un tronc et des branches, enfonce ses racines dans la vieille écorce, projette de longues tiges gracieusement courbées vers le bout, garnies de deux rangées de feuilles d’un vert bleuâtre, et chargées à certains momens de quatre ou cinq fleurs, — fleurs sans pareilles, fermes comme si elles étaient de cire, d’un blanc laiteux, portant un éperon semblable à une énorme queue longue de plus de 40 cen-

  1. Areca madagascariensis.
  2. Angrœcum eburneun, A. superbum, A. sesquipedale. Du Petit-Thouars.