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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 septembre 1872.

Où donc est la politique aujourd’hui, à cette heure d’un lent et chaud déclin de l’été ? A-t-elle été à Berlin, dans cette entrevue des empereurs, qui était comme une représentation de gala offerte à l’Europe inoccupée ? A-t-elle été à La Haye, dans ce congrès du radicalisme cosmopolite, qui est comme la pièce burlesque de la saison ? Est-elle à Genève, dans l’acte si nouveau de ce tribunal de paix qui, par la seule autorité de la raison et de l’équité, vient de mettre fin à une interminable querelle entre deux grandes nations, l’Angleterre et les États-Unis ? En France même, où est la politique ? Est-elle sur les chemins ou à Versailles avec nos ministres, à Trouville avec M. le président de la république, qui semble prolonger son séjour comme pour mieux attester la tranquillité profonde du pays, — dans les départemens avec les députés, qui écrivent des lettres à leurs électeurs, ou avec les conseillers-généraux, qui envoient des adresses à M. Thiers ?

La politique est un peu partout, dans ces spectacles extérieurs dont on s’occupe à chercher le sens et dans ce travail national invisible, inaperçu, que le repos apparent des vacances n’interrompt pas. Ce repos salutaire et fécond par lui-même, on l’accepte comme le premier des bienfaits après tant de secousses et d’émotions violentes. On se dit qu’on reviendra bien assez tôt aux problèmes épineux, laborieux, qu’il sera impossible d’éviter. En attendant, on prolite de ces quelques mois de vacances pendant lesquels le pays se raffermit, les esprits modérés s’éclairent, les passions agitatrices sentent leur impuissance. De temps à autre, on tourne un regard en arrière, on voit les effroyables épreuves qu’il a fallu traverser, où la société française a failli sombrer, on mesure les progrés accomplis, le chemin parcouru, et dans cette tranquillité nouvelle, si péniblement reconquise, on reprend confiance en se disant que bien des difficultés, en apparence insolubles, se résoudront peut-être d’elles-mêmes par la paix et dans la paix intérieure. Là est le mot de la situation, là aussi est le secret de la force réelle et croissante de ce gouvernement qui existe aujourd’hui, dont l’unique mission a été, est encore