Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 101.djvu/900

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les décompositions putrides, s’opposent aux corruptions de la matière organique. Il est permis de présumer que ces vertus, constatées dans le laboratoire des chimistes, seront efficaces dans le laboratoire de l’économie animale.

Indépendamment des remèdes qu’on oppose au choléra déclaré, il en est de préventifs qu’il est sage d’employer en temps utile : ce sont les substances désinfectantes et antiseptiques, comme l’acide phénique, le coaltar, le chlorure de chaux. La nature corrosive de ces produits empêche ce les administrer à l’intérieur et d’en éprouver l’influence thérapeutique; mais il est certain qu’ils exercent une action destructive sur tous les corpuscules organiques, et le plus souvent en paralysent les propriétés malfaisantes. À ce titre, il est rationnel de s’en servir pour purifier et assainir l’atmosphère, surtout l’atmosphère confinée des appartemens et des hôpitaux durant les périodes épidémiques. C’est à l’administration de prendre des mesures promptes et de fournir des indications claires pour assurer partout, en temps opportun, l’usage de ces substances.

Au point de vue de l’hygiène individuelle, la seule prescription est de vivre avec régularité et sobriété. Les excès, toujours funestes, le sont plus que jamais en temps d’épidémie. Il va sans dire qu’une extrême propreté n’est pas moins indiquée; ce qui l’est peut-être encore plus, c’est le calme et la sérénité de l’esprit. La force morale importe ici non moins que la santé physique. Quand le choléra sévit, les dérangemens intestinaux sont très fréquens, et dans l’immense majorité des cas la maladie survient non pas d’une manière foudroyante, mais à la suite d’une diarrhée qui dure plus ou moins de temps. L’expérience a démontré qu’en combattant cette première manifestation par les opiacés et par le sous-nitrate de bismuth, on prévient souvent l’explosion du choléra. En Angleterre, le gouvernement organise, quand l’épidémie sévit, des visites domiciliaires pour faire constater et traiter, s’il y a lieu, les prodromes de ce genre.

On le voit, il n’y a point encore de spécifique contre le choléra. La thérapeutique peut-elle concevoir l’espérance d’en découvrir un dans l’avenir? Rien n’autorise à en douter. On a trouvé un remède héroïque contre les fièvres intermittentes, le quinquina, sans connaître le moins du monde la cause première de cette maladie, sans avoir la moindre notion du miasme paludéen. Peut-être de même apprendra-t-on à détruire le miasme cholérique avant d’en pénétrer la nature intime. En attendant, il est permis de compter que le choléra, soumis en ceci à la mystérieuse loi qui gouverne l’évolution séculaire des épidémies, perdra de son intensité au fur et à mesure qu’il s’éloignera de son origine. Ces germes morbides, ces virus, semblent n’être point doués du pouvoir de se reproduire in-