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la collection avait à la fois singulièrement élargi sa tâche et résolu, dans la mesure que comportaient le temps et le milieu où il vivait, un problème dont personne avant lui ne s’était même avisé de poser les termes.

Est-ce assez d’ailleurs de ne reconnaître aux pièces rassemblées ici que cette valeur et cette importance relatives ? Quelque incomplète qu’on la juge et qu’elle soit en effet à certains égards, la collection Lallemant de Betz n’en fournit pas moins, même aujourd’hui, sur plusieurs points des éclaircissemens qu’on chercherait vainement dans des collections beaucoup plus vastes, et nous pourrions citer telles estampes rares, comme la Grand’Salle du Palais, à Paris, et la Cité de Lyon, gravées par Ducerceau, telles autres à peu près introuvables, comme les Tableaux astrologiques d’Antonio Carrarino, dont les épreuves se sont conservées dans ces volumes au grand profit de l’érudition moderne, ou tout au moins de notre curiosité.

Les études scientifiques, auxquelles la collection Lallemant de Betz ne devait cependant pourvoir qu’en attendant mieux, ont trouvé depuis et trouvent encore tout l’aliment nécessaire dans l’immense série de pièces historiques réunies par Fevret de Fontette, et lorsqu’en 1770 ces pièces, au nombre de plus de douze mille, devinrent la propriété du cabinet des estampes, elles y constituèrent d’emblée un fonds d’enseignement assez riche pour que les acquisitions faites depuis, — excepté, bien entendu, en ce qui concerne les événemens de la fin du dernier siècle, — ne l’aient pas très sensiblement augmenté.

Comme dans les recueils qui avaient appartenu à Lallemant de Betz, la part des portraits est considérable dans la collection de Fontette, sauf cette différence pourtant que les images admises ici sont exclusivement celles de personnages français. Quoi de plus naturel, puisque c’est l’histoire nationale, non pas une histoire universelle, que Fontette prétendait raconter aux yeux, pour ainsi dire, en la composant de la série chronologique des divers documens figurés ? Les portraits de tous les hommes ayant joué un rôle quelconque dans cette histoire de notre pays, les estampes reproduisant tous les événemens militaires ou politiques, les faits épisodiques même, se rattachant au règne de chacun de nos rois, tels étaient les souvenirs qu’il voulait consacrer et les élémens qu’il se proposait de mettre en œuvre. Le plan arrêté par lui différait donc complètement de celui qu’avaient successivement adopté Clément et le premier possesseur de la collection Lallemant de Betz ; il ne se rapprochait pas davantage du projet qu’avait réalisé Gaignières de dresser avec le crayon et le pinceau une sorte d’inventaire des monumens de la sculpture ou de la peinture nationale