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comptant ou à terme, et composent l’aristocratie de l’espèce. Au-dessous d’elles, et ne donnant lieu qu’à des transactions au comptant, on trouve mentionnées parmi les valeurs diverses neuf ou dix sociétés françaises et deux étrangères consacrées aux opérations de crédit territorial ou autres ; enfin sur la cote du marché libre figurent quelques sociétés de crédit étrangères, surtout celles qui ont été créées avec le concours des sociétés françaises, dont elles sont les correspondans nécessaires et les satellites. Après la Banque de France, notre grand établissement national, qui est un véritable instrument de gouvernement, une institution d’état, dont on sait le rôle patriotique et l’influence souveraine dans ces deux dernières années, la plus ancienne de nos grandes sociétés de crédit, le Comptoir d’escompte, a été fondée en 1848 pour venir en aide au commerce et à l’industrie française à la suite de la crise provoquée par la révolution de février. Les premières années du régime politique inauguré en 1852 ont vu successivement se fonder le Crédit foncier, le Crédit mobilier, le Crédit agricole, la Société industrielle et la Société générale, etc. ; la Société des dépôts et comptes courans et le Crédit lyonnais ont été les derniers venus de cette première période, qu’on peut dire celle de la création des grandes-affaires industrielles, et dont l’histoire a été si souvent faite ici même.

Au sortir d’années de langueur, suite de la crise de 1848, la France, comme l’Europe entière, s’était sentie possédée d’un immense besoin d’activité et de travail. Les théories les plus audacieuses et les plus séduisantes se produisirent alors ; des hommes dont il ne faudrait pas oublier le rôle prépondérant poursuivirent chez nous et à l’étranger la réalisation de leurs conceptions. C’était le moment où se fondaient le Crédit foncier, le Crédit mobilier, qui servit de type à tant d’établissemens semblables en Italie, en Espagne, en Autriche même, et se réunissaient d’énormes associations de capitaux pour construire les grands réseaux de chemins de fer, en France d’abord, dans plusieurs des autres états de l’Europe ensuite. Les établissemens de crédit qui se fondèrent alors semblaient avoir des visées plus hautes que ceux dont nous avons vu la constitution récente. Le Crédit foncier aspirait à libérer la propriété territoriale de la dette hypothécaire ; il a surtout servi à subventionner les constructions de Paris. Le Crédit mobilier ne tendait à rien moins qu’à substituer à tous les titres de valeurs négociables à la