Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 102.djvu/633

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’acquisition de tant de pièces précieuses avait notablement augmenté les œuvres des peintres et des graveurs ; celle qui fut faite à la même époque de toutes les études, de tous les plans laissés par le célèbre Robert de Cotte et par son fils Jules-Robert, apportait un supplément plus considérable encore aux séries topographiques et aux recueils sur l’architecture déjà conservés au département des estampes. On sait l’importance et le nombre des travaux exécutés sous la direction de ces deux artistes, successivement héritiers du titre de premier architecte du roi, dont avait été revêtu leur beau-frère et leur oncle, Jules-Hardouin Mansart. Depuis la chapelle du palais de Versailles jusqu’à l’église de Saint-Roch à Paris, depuis l’appropriation des bâtimens de l’hôtel de Nevers au logement de la Bibliothèque royale jusqu’à la construction d’une multitude de palais, de châteaux, en France ou à l’étranger, — tous les souvenirs des entreprises qu’ils avaient menées à fin l’un et l’autre, — tous les détails relatifs aux immenses tâches dont ils avaient été chargés, se trouvaient consignés dans une série de pièces dont le nombre s’élevait à plus de 3,000, sans compter les devis, les mémoires et autres papiers d’affaires contenus aujourd’hui dans six gros portefeuilles. À côté de ces documens authentiques sur l’histoire intime de deux talens, d’autres indications se rencontraient sur les travaux accomplis par les architectes les plus renommés du même temps et de la même école. Il n’y a pas d’exagération à dire que l’architecture française, dans ce qu’elle a produit de principal depuis la seconde moitié du XVIIe siècle jusque vers le milieu du siècle suivant, pourrait être appréciée à sa valeur lors même qu’on ne consulterait pour l’étudier que les recueils provenant de la collection de Cotte, — comme, dans un autre ordre d’art et de travaux, les croquis de Gabriel de Saint-Aubin d’après les tableaux de chaque salon, croquis conservés aussi au département des estampes, suffiraient pour donner une idée exacte des doctrines et des goûts propres à l’école de peinture contemporaine.

Trois années après celle où le département des estampes s’était enrichi d’une partie de la collection de Silvestre et de la collection de Cotte tout entière, l’empire en s’écroulant livrait la Bibliothèque aux revendications qu’allaient poursuivre jusqu’en 1816 les représentans des puissances dépossédées de leur bien. Certes les œuvres d’art réclamées au nom de ces gouvernemens étrangers ne devaient pas laisser ici les mêmes vides que dans les galeries de tableaux et de statues au Louvre, et nous avons dit déjà que, sauf un certain nombre de pièces flamandes ou hollandaises, ce qui fut restitué par le département des estampes n’eut pas pour effet de