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Valachie, on trouve un bakal ou cabaret perdu sur la côte de l’Asie-Mineure, des maisons dans des hameaux inconnus ; à côté d’une grande manufacture comme celle d’Emmanuel Constantin, à Mansoura, vingt échoppes et de pauvres cabanes. Le total de ces revenus annuels monte à 140,000 drachmes. Une plaque de marbre placée dans le palais de l’université, au haut de l’escalier principal, porte les noms de ces bienfaiteurs qui appartiennent à des pays si divers. L’institution fondée ainsi est vraiment l’œuvre des Hellènes, l’œuvre de la nation tout entière.

C’est également par des dons qu’ont pu être entrepris à Athènes ces beaux édifices qui vont être terminés : l’académie, l’école polytechnique, le musée, monumens dignes des plus grandes villes. Le Rizarion, séminaire pour les prêtres, doit son nom au Grec libéral qui l’a doté ; de même l’Arsakeion, qui est consacré à l’instruction des jeunes filles. Athènes est l’école des Hellènes ; non-seulement les professeurs qu’on y trouve sont nés pour la plupart en Turquie, mais les élèves de toutes les provinces ottomanes viennent les entendre. L’université compte quatre facultés, 40 professeurs et annuellement de 1,000 à 1,100 élèves. En 1867, sur 373 candidats qui, depuis 1840, avaient passé avec succès les examens de la faculté de droit, on comptait 5 Thraces, 6 Macédoniens, 15 Épirotes, 3 Thessaliens, 6 Ioniens ; pour la médecine, 13 habitans de Constantinople, de Philippopolis et d’Andrinople, un même nombre de Macédoniens, 34 Épirotes, 20 Thessaliens. La Grèce envoie des médecins dans toutes les provinces de l’empire ottoman. Ce qui est peut-être plus important encore, c’est le nombre d’institutrices qui sortent chaque année de l’Arsakeion. Sur l’Adriatique, à Durazzo, dans le Balkan, à Philippopolis, au centre de l’Anatolie, à Angora, on trouve des jeunes filles qui ont fait leur éducation dans cette école. Elles habituent les enfans au travail domestique, à la couture en même temps qu’elles leur enseignent les élémens des lettres et des sciences. Il n’existe peut-être pas dans toute la Grèce de création plus utile que l’Arsakeion. Certes les sœurs françaises, qui se sont établies partout, rendent de sérieux services, mais elles appartiennent à une religion qui n’est pas celle du pays ; si grande que soit la confiance que les habitans leur témoignent, elles viennent d’Occident, et souvent tous leurs efforts ne peuvent triompher des obstacles qu’elles trouvent dans la différence des mœurs, des habitudes et des croyances. Aucune éducation ne vaut celle qu’un pays se donne lui-même, quand ses maîtres connaissent à la fois les meilleures méthodes des nations étrangères, et le caractère propre aux enfans qu’ils doivent instruire.

La Grèce a compris combien, par les privilèges de liberté qui lui sont assurés, elle pouvait contribuer au progrès des Hellènes de