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sous l’influence de la contraction musculaire. M. Sédillot, qui a le sentiment le plus exquis de l’antiquité médicale et qui la connaît à fond, n’a pas laissé ignorer que Celse avait déjà, il y a bientôt deux mille ans, proposé l’évidement des os ; mais les préceptes de Celse n’avaient pas été reçus dans la pratique. Le célèbre chirurgien français a tiré ces préceptes antiques de l’oubli, en a prouvé par des raisons nouvelles l’utilité et l’importance, expliqué les indications et les succès, et a rendu ainsi à la pratique éclairée et savante de l’art une des plus précieuses ressources contre les redoutables maladies et blessures des os.


II

La vie est une force expansive et pénétrante qui tend à s’emparer de tout ce qui entre dans le cercle de son activité. On vient de voir qu’elle remplit les vides provenant de l’ablation de certaines parties organiques ; on va voir maintenant qu’elle gagne, par une opération inverse, les parties qu’on ajoute aux êtres vivans, — car les greffes ne sont pas autre chose que des fragmens vivans soudés à un organisme déjà complet. Dans la greffe végétale, la partie greffée ne fait point partie intégrante de l’individu sur lequel elle a été transportée. Elle ne vit point de la même vie. Elle se développa en quelque sorte d’une façon parasite aux dépens de celui-ci, — comme le gui sur le chêne, — et, que le fragment greffé soit ou ne soit pas de la même espèce que l’arbre auquel on le conjoint, il en reste toujours physiologiquement distinct. Il n’en est pas ainsi chez les animaux.

La greffe animale consiste d’une façon générale à porter sur un point d’un individu une partie prise sur un autre point du même individu ou sur un sujet différent, et à réaliser la connexion de la partie greffée avec l’organisme qui lui sert de support de manière qu’elle en devienne complètement solidaire, qu’elle vive de la même vie, qu’elle en suive les destinées physiologiques. On peut ainsi transplanter d’un animal à un autre soit des fragmens de tissu, soit des organes tout entiers, soit de simples élémens anatomiques. Les cellules de la choroïde de l’œil, portées sous la peau d’un animal, conservent leur vitalité sur ce nouveau terrain, et y deviennent même le point de départ d’une formation plus ou moins abondante de cellules semblables. La transfusion du sang n’est autre chose que l’introduction de globules rouges empruntés à un organisme dans un organisme différent. Cette opération réussit, même alors que le sang passe d’un individu à un individu d’espèce très-éloignée. Ainsi on peut introduire du sang de mammifère dans