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tempêtes, par un tumulte des élémens, au sortir duquel la terre apparaissait de nouveau verdoyante, avec toutes les promesses du plus riche été. La double action des pluies et du brillant soleil avait opéré ce miracle ; le soleil avait, pendant l’orage, combattu le nuage sombre qui menaçait de l’envelopper, et qui retenait dans ses flancs la bienfaisante pluie. On conçoit qu’un langage abondamment figuré ait de lui-même transformé les agens de ces luttes naturelles en personnes animées et divines : on a eu de la sorte le combat d’Indra contre Vritra. Vritra est le monstre noir qui détient l’eau fécondante et la lumière dorée. Indra s’avance contre lui ; il porte une arme terrible, en forme de marteau ou de croix, dont les coups, annoncés par le tonnerre, signalés par la foudre, sont inévitables, et qui, à peine a-t-elle frappé, revient aussitôt dans sa main, tandis que le nuage déchiré rend à la terre les rayons et les eaux. À ce thème principal viennent se joindre les additions et les variantes. Indra est accompagné dans son glorieux combat par les Maruts, qui sont les vents d’orage, et par les Ribhûs, esprits élémentaires auxquels s’associent les âmes des morts. A chaque branche nouvelle du mythe qui s’accroît poussent des rameaux et des feuillages, Les Maruts parcourent les airs en équipage brillant, avec des bracelets d’or, des cuirasses et des armes étincelantes. Ils font retentir un chant terrible, et le ciel et la terre tremblent, les montagnes chancellent, les arbres se renversent, les nuages se dispersent en poussière, car leur nom a pour racine mar, qui signifie faire mourir, broyer, pulvériser. Les Ribhûs, de leur côté, sont vantés comme d’habiles forgerons ; ce sont eux qui, sous la conduite de leur maître Tvashtri, travaillent pour les dieux : Indra leur doit son arme redoutable.

Une autre forme du mythe qui s’est constitué dans les Védas autour du dieu maître de l’atmosphère est celle qui représente Indra comme pasteur du ciel, et les nuages comme des vaches composant son troupeau. Il s’irrite quand son ennemi méchant les attire à lui ; mais vainqueur, il les trait avec sa foudre, et leur lait, c’est-à-dire la pluie, vient rafraîchir les hommes ; lui-même se nourrit de ce lait. Il suffit de quelques citations des Védas, prises au hasard, pour mettre en relief ces lignes principales du mythe.


« Par la force de sa massue, Indra a foudroyé Vritra, qui desséchait le monde : il a délivré des fleuves semblables à des vaches enfermées ; il a répandu glorieusement ses bienfaits.

« Les eaux se réjouirent de son effort quand il dompta Vritra avec sa massue : le dieu fort, généreux envers les généreux, plein de fougue, a inondé les terres.

« Tvashtri avait fabriqué à Indra une massue divine : comme des