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l’être humain, sera petit, maigre, sec, tellement sobre que sa tête est aussi vide que son estomac. Le type de cette race, le Bédouin, l’Arabe nomade ne pense guère et ne sait rien ; son imagination est aussi aride que le désert. Un cheval rapide, une lance haute, et droite, un beau chameau, une belle femme : voilà l’éternel sujet de ses poèmes. Ses sensations, toujours les mêmes, ne créent que des sentimens et des idées d’une simplicité monotone. Simple est aussi la langue, et simple la syntaxe. La déclinaison, la conjugaison, toutes les formes grammaticales sont également pauvres. Point, de termes abstraits pour exprimer des idées générales. Les enfans d’ailleurs, ont-ils des idées générales ? Et en effet, c’est un langage d’enfant que ces discours naïfs ou les propositions s’enchaînent et se suivent sans autre lien que la conjonction et. A coup sûr, de pareils êtres, à l’état nomade ou sédentaire, ne seront jamais de bien grands artistes ; encore moins seront-ils philosophes ou savans. Aristote, Hippocrate, Ptolémée, toute la science grecque devait passer sur ces cerveaux racornis, sans y laisser plus de traces que les pluies d’hiver dans le lit de leurs torrens.

Pour n’être ni artiste, ni philosophe, ni savant, on n’en est pas moins homme. On ne peut vivre, dans un rapport intime avec la nature sans éprouver mille émotions diverses, plus ou moins vives, sans se sentir pénétré de terreur ou d’admirations sans exalter les forces destructives, ou conservatrices de l’univers. Entre toutes ces forces, la plus puissante est sans contredit le soleil, le feu du ciel, père de notre feu terrestre, cause unique et suprême, du mouvement et de la vie sur cette planète, point n’est besoin de raisonner pour comprendre que c’est la vie même et comme le sang de notre père céleste, qui court dans les veines de la terre, notre mère. Dans la saison d’amour, quand le ciel lumineux l’enlace et la pénètre, de son sein fécondé ou voit sortir un monde. C’est elle qui tressaille dans les plaines où l’air humide et chaud courbe mollement les herbes ; c’est elle qui rampe dans le buisson, qui s’élève dans le chêne, qui jette aux solitudes les petits cris joyeux des oiseaux sous la nue ou dans les nids feuillus ; c’est elle qui dans les mers ou dans les eaux courantes, sur les monts, dans les bois, accouple les mâles superbes aux femelles lascives, palpite dans tous les corps, aime avec tous les êtres ; mais toute cette vie terrestre, toute cette chaleur et toute cette lumière ne sont qu’effluves du soleil. « Nous sommes, dit Tyndall, non plus dans un sens poétique, mais dans un sens purement mécanique, nous sommes des enfans du soleil. » Ce que la science, de nos jours, a constaté, la raison des anciens hommes l’avait compris d’instinct.

Loin, bien loin dans le passé, alors que n’existait aucune