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mieux dire, enveloppée, que ce qui en existait d’abord est devenu à peu près, sous les formes dont il l’a revêtu, ce qu’est le croquis primitif à un tableau ou l’armature à une statue. Ces monumens de la renaissance dont il lui appartenait de disposer, tant au profit de la décoration générale que dans l’intérêt des études, il les a groupés ou répartis avec une habileté si ingénieuse qu’ils semblent avoir été faits, il y a trois siècles, en prévision de leur destination actuelle. Dans le cadre où il figure, dans le mur où il est incrusté, chaque fragment, si fruste qu’il soit, a l’apparence d’un joyau dont l’écrin qui l’enserre fait d’autant mieux ressortir la rareté et le prix.

Dans un autre ordre de composition archéologique, ne sont-ce pas aussi des modèles de goût, d’érudition sans pédantisme, que cette cour dite du Mûrier, avec ses galeries ornées de mosaïques et de peintures à l’imitation ou plutôt en souvenir d’un atrium pompéien, et surtout que le vestibule auquel cette cour donne accès, du côté de la grande salle d’exposition perpendiculaire au quai ? Exemplaire charmant de ce que devait être le procœton, ou, si l’on veut, l’antichambre dans une habitation antique, ce vestibule, relativement obscur, apparaissant au-dessus des degrés et derrière les colonnes qu’éclaire une lumière d’à-plomb, ce fond sobrement colorié, mais d’une couleur qui semble intense par le contraste avec l’éclat des statues se dessinant un peu en avant du plan où se dressent les colonnes, — tout cet ensemble harmonieux de lignes et de tons offre au regard un des plus délicats spectacles que l’art lui ait ménagés de notre temps. Et si l’on revient sur ses pas pour rentrer sous le portique entourant la cour, l’aspect de celle-ci aperçue de cette place n’est ni moins imprévu, ni moins séduisant. Il y aurait là pour un peintre tous les élémens d’un tableau, comme il y a de la part de l’architecte qui a su ainsi en fournir la donnée les témoignages les moins équivoques d’imagination. Peut-être ne trouverait-on que dans quelque palais italien l’équivalent de l’effet que produisent ici les formes et les couleurs combinées de l’architecture et de la végétation, de la sculpture et de la peinture, depuis les bas-reliefs et les statues installés le long du portique jusqu’aux arbrisseaux au milieu desquels s’élève la fontaine, jusqu’aux faïences peintes d’après la Galatée de Raphaël encastrées dans le mur du corps de logis principal.

Que d’autres parties ne faudrait-il pas citer encore parmi les divers bâtimens dont se compose l’ensemble de l’École des Beaux-Arts, combien d’autres preuves hautement significatives n’aurait-on pas à relever, si l’on entreprenait un examen détaillé de tous les travaux successivement, accomplis par Duban sur ce terrain qui, pendant plus de trente ans, a été pour lui et pour son talent un