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l’Angleterre se fait principalement par des jeunes filles de quatorze à dix-huit ans. Les renseignemens de l’enquête de 1843 sont confirmés par de récentes communications de la société anglaise pour l’avancement des sciences sociales. L’état des choses n’a pas changé. Les ateliers de Birmingham emploient toujours la même proportion de femmes pour les ouvrages métalliques ; on nous représente les ouvrières du Staffordshire, adonnées à la fabrication des clous, comme « noires de suie, musculeuses, grossières et repoussantes. » Dans beaucoup de poteries et de manufactures de porcelaine, dans les briqueteries aussi, l’on compte parfois plus de femmes que d’hommes. Dans les papeteries, le nombre des jeunes filles est souvent égal, quelquefois supérieur celui des travailleurs de l’autre sexe. Il ne faut pas oublier non plus que les femmes étaient occupées naguère en Angleterre dans les travaux souterrains des mines, qu’elles sont encore employées dans les travaux de la surface, qu’en Belgique on les rencontre au fond des houillères, qu’il en était de même en Silésie avant un arrêté de l’année 1869.

Nous avons esquissé à grands traits le champ de la main-d’œuvre féminine dans les manufactures. Veut-on se rendre compte par des chiffres du nombre de vies de femmes qui se consument dans ces travaux d’atelier ? Un inspecteur des manufactures anglaises, M. Baker, dans un rapport récent, fixait ainsi qu’il suit, pour le royaume-uni, l’effectif de ces ouvrières de la grande industrie : en 1861, il y avait, comme nous l’avons vu, dans les manufactures de coton, lin, laine, mélanges, chanvre, jute, bonneterie, 467,261 femmes ; en 1864, on en complaît 20,000 dans les poteries et les établissemens analogues ; il y en avait 260,000 dans les autres ateliers de diverses natures soumis ou non au régime des factory arts. C’était un total de 747,000 femmes travaillant en fabrique. Lord Brougham, dans un de ses discours, affirme que les trois quarts des femmes adultes, non mariées, les deux tiers des veuves et un septième des femmes mariées sont occupées dans la Grande-Bretagne à des travaux du dehors, sans compter la multitude des épouses, des filles et des sœurs qui participent, soit au comptoir, soit dans les fermes, soit dans les ateliers domestiques, aux industries de la famille. De cette organisation du travail des femmes en Angleterre résultent des faits sociaux qui sont caractéristiques. On sait que dans tous les pays d’Europe le nombre des femmes est très légèrement supérieur au nombre des hommes, quoiqu’il naisse un peu plus de garçons que de filles ; mais cette différence entre les deux sexes, bien que constante, est généralement minime, puisque en France l’on comptait en 1866 une population masculine de 19,014,079 individus, contre une population féminine de 19,052,985. Elle devient très