Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 97.djvu/697

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chaque année au recensement effectif de tout le matériel. Cette règle était aussi excellente en théorie que détestable dans la pratique. Autant il est facile de faire une vérification de la caisse au 31 décembre, et d’arrêter le chiffre des valeurs qu’elle contient, autant il est impossible d’exécuter une vérification semblable dans les arsenaux. Il est au-dessus des forces d’un fonctionnaire d’inventorier réellement dans une journée tout ce qui existe dans son service, de compter les canons, les fusils, les armes de toute espèce, les outils, les ustensiles, les machines, de peser les fers, les fontes, les cuivres, de mesurer les draps, les toiles, de cuber les fourrages et les bois, de constater la nature, la qualité, la quantité des vivres, des médicamens, des objets de pansement, en un mot de tout ce qui constitue le matériel de la guerre. Aussi les recensemens se faisaient mal, ou dans certains services ne se faisaient pas du tout ; la situation des magasins restait plongée dans des ténèbres regrettables. À ces prescriptions illusoires, le nouveau règlement a substitué une règle moins absolue, mais plus pratique. Les recensemens n’auront plus d’époque fixe ; ils s’exécuteront au moment où ils pourront se faire avec le plus de facilité et de profit ; ils auront lieu inopinément. Les fonctionnaires chargés de l’opération devront se présenter à l’improviste, comme le font les inspecteurs des finances pour les comptables du trésor. Ils procéderont, suivant ce qu’ils jugeront convenable, à un recensement général ou partiel ; s’ils opèrent partiellement, ils devront renouveler leurs vérifications, de manière à obtenir un recensement complet dans le cours de l’année. Le résultat de leur travail sera consigné en tête du compte annuel de gestion.

Tout en approuvant la sagesse de ces dispositions, tout en reconnaissant la bonne volonté de l’administration et le désir qu’elle a de les faire appliquer, il serait à craindre qu’il ne fût difficile d’en assurer l’exécution rigoureuse, si l’on ne s’efforçait de réaliser les deux conditions suivantes : d’abord un aménagement convenable des magasins, ensuite l’indépendance des fonctionnaires auxquels on confie le travail du recensement. Il est indispensable d’introduire dans le rangement des matières les méthodes les plus propres à en faciliter la reconnaissance, et de disposer en conséquence les divisions, les rayons, les casiers qui se prêteront le mieux à l’application de ces méthodes. L’indépendance des officiers chargés du recensement n’est pas moins essentielle. Sans vouloir soustraire la surveillance des magasins au contrôle local, tel qu’il est organisé, il serait bon d’établir des vérifications analogues à celles qui sont opérées pour les deniers par les inspecteurs des finances. On donnerait à certains fonctionnaires la mission de faire