Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 98.djvu/321

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et cependant, quand tu es resté quelque temps loin de chez toi, tu soupires après tes foyers, et tu as su aimer ta femme et ta sœur. Oui, tu as beau être un homme de bronze, un prince rigide sur le trône de l’intelligence, tu as un cœur qui jamais ne se raillera du mien. »

Puis, s’adressant aux Welches, M. de Redwitz les frappe d’anathème. Il stigmatise avec un impitoyable acharnement le mensonge welche, la perfidie welche, l’immoralité welche, la corruption welche! A toutes ces horreurs il oppose l’honnêteté allemande, la chasteté allemande, la piété allemande, la conscience allemande et toutes les vertus que Dieu a récompensées d’une manière si éclatante en faisant passer 5 milliards des poches françaises dans les poches allemandes.


« Qui ne roussirait, s’écrie-t-il, d’avoir pu jadis admirer les manières welches, parler la langue welche, adopter des maximes welches? »

.... De quel front cet ennemi de Dieu
Vient-il infecter l’air qu’on respire en ce lieu?

« Qui donc aujourd’hui, poursuit-il, regarderait sans dégoût le bourbier welche?.. Ce que recouvrait une chair rosée éclate maintenant comme un abcès purulent. Des cadavres putréfiés jonchent de toutes parts ce jardin parfumé qui recouvrait un cimetière. Jamais on ne vit pareille pourriture, qui brave toute honnêteté;... ce peuple était digne de son Bonaparte. »


L’Allemagne elle-même, hélas! n’est pas sans reproche. Le poète s’indigne de ne pas trouver autour de lui des enthousiasmes aussi brûlans que le sien : « non, les cœurs ne sont pas assez pavoisés. » Les uns se permettaient de critiquer les opérations de guerre, fâcheuses habitudes, dispositions chagrines contractées dans un temps de paix. D’autres affectaient de craindre que Gravelotte et Sedan ne préparassent à l’Allemagne le règne du sabre, « comme si un peuple de héros pouvait se laisser asservir. » D’autres encore se plaignaient qu’après avoir fait la guerre à Napoléon, on la fît à la France, et demandaient la paix à grands cris, « race de tièdes et de lâches. » Les femmes non plus, ô honte! ne furent pas toutes irrépréhensibles. On en a vu qui, dans les hôpitaux, s’occupaient de préférence des blessés ennemis, et « les dorlotaient avec des minauderies welches. » — « Méritent-elles, ces femmes, le nom de femmes allemandes? Non, ce ne sont que des dames, aussi peu allemandes que leur langue et leur toilette... Paix, mon cœur! ne te livre pas à la colère! oublie ces quelques gouttes d’eau sale noyées dans un océan d’amour pur et sacré. »