Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 98.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’empire. Le pape résolut de profiter de la circonstance pour enrôler dans sa cause des personnages d’une autorité aussi puissante que l’empereur d’Occident, et deux princesses, l’une fille, l’autre tante de l’Auguste d’Orient.

La visite eut lieu en effet, et les souverains d’Occident, arrivés à Rome le 21 février, allèrent dès le lendemain matin à l’église, où Léon les attendait. Il y avait passé la nuit au milieu des évêques pour célébrer avec eux l’office des Vigiles. A la vue de l’empereur, il s’avança vers lui le visage trempé de larmes, la voix si entrecoupée de sanglots qu’il ne pouvait, disent les anciens documens, faire entendre ses paroles; il le conjura par ce même apôtre dont ils honoraient la mémoire, par son propre salut, par celui de Théodose enfin, son collègue et son père, d’écrire à ce prince pour obtenir la réparation des iniquités d’Éphèse et la remise des choses en l’état où elles étaient avant le procès d’Eutychès. Dans l’excès de son émotion, il se prosterna devant lui, tenant ses genoux embrassés, — les impératrices unirent leurs supplications à celles du vieillard, et Valentinien consentit; mais sa lettre n’obtint de Théodose qu’une réponse pleine d’amertume et de dureté. « Le pape, y était-il dit, ne pouvait point l’accuser d’avoir abandonné, en quoi que ce fût, la foi des pères, lorsqu’il travaillait précisément à la maintenir. C’était dans ce dessein qu’il avait assemblé le concile d’Éphèse, où l’on n’avait condamné que ceux que l’amour de la vérité et de la justice obligeait de condamner. Flavien méritait ce qu’il avait souffert, puisque sa déposition avait rendu la paix à l’Orient, où l’union et la vérité recommençaient à régner dans toutes les églises. — Qu’on ne me tourmente donc plus, ajoutait-il, pour remettre en question une affaire jugée et terminée par l’autorité de Dieu même.» Il n’y avait plus à espérer.

Sur ces entrefaites, on connut à Rome la mort de Flavien et les circonstances de cette mort, — affreux dénoûment de la tragédie d’Éphèse. On apprit bientôt que Théodose aussi avait cessé de vivre. La première de ces nouvelles augmenta l’horreur des Occidentaux pour Dioscore et son concile; la seconde rouvrit la porte à l’espérance. Qu’était le nouvel empereur choisi par Pulchérie? On l’ignorait; mais la main qui l’avait choisi donnait confiance aux catholiques. Les premières mesures de Marcien firent voir qu’il abordait résolument l’œuvre de la réparation religieuse, autant du moins qu’elle pouvait être accomplie par l’autorité séculière. La loi qui rendait obligatoire la reconnaissance du faux concile abrogée, les recherches inquisitoriales supprimées, les bannis rappelés, Eutychès chassé de son monastère, où un abbé catholique le remplaçait, inauguraient une nouvelle ère de reconstruction religieuse à laquelle le pape s’empressa de s’unir en levant plusieurs dépositions scanda-