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depuis 1820 à Paris une école supérieure de commerce[1] et une école commerciale fondée en 1863 par les soins de la chambre de commerce, qui patronne également la première. A l’école Turgot et au collège Chaptal, les études commerciales et industrielles sont également poursuivies de préférence aux études classiques. Tous ces établissemens n’ont que peu de rapport avec les écoles pratiques dont il a été question. Les élèves y sont internes ; l’enseignement commercial qu’ils reçoivent rappelle celui des divisions dites de français de plusieurs de nos lycées et de quelques-uns de nos grands pensionnats. En Allemagne, on compte plusieurs écoles supérieures de commerce, notamment une très remarquable à Leipzig ; mais en Angleterre il n’y en a aucune, et cet oubli des Anglais s’explique par la facilité qu’ont chez eux les jeunes gens, pour s’expatrier, et aller apprendre le commerce dans les comptoirs de la Grande-Bretagne.

Le Havre a désormais son école, rivale de celle d’Anvers, où accourront tous les jeunes gens du nord de l’Europe et ceux des États-Unis et des Antilles. Marseille à son tour desservira tout le bassin méditerranéen, où elle est reine. L’Italie, l’Espagne, la Grèce, la Turquie, l’Autriche, et bientôt l’Afrique, les mers de l’Inde, de Chine, du Japon, enfin les républiques hispano-américaines, avec lesquelles elle entretient des relations si suivies, lui enverront de nombreux élèves ; aux langues anglaise, allemande, italienne, espagnole, déjà portées sur son programme, l’école pourra joindre l’arabe, le turc, le grec moderne, indispensables à beaucoup de négocians de cette place, et quelque jour le malais, le chinois, le japonais, qui vont bientôt prendre droit de cité chez elle grâce à la porte toujours ouverte du canal de Suez[2]. Nulle place en France ne convenait mieux à l’établissement d’une semblable institution. Chacun l’a bien vite compris. La chambre de commerce, diverses sociétés financières, industrielles, ont généreusement souscrit des premières et fondé à l’envi des bourses. Tous les grands négocians se sont d’eux-mêmes associés à ce mouvement.

Il ne faut pas se dissimuler que, dans nos écoles de commerce, il sera plus aisé d’avoir des élèves que des professeurs. Dès qu’on abandonne le domaine de la théorie pour entrer dans celui de la pratique, les hommes en France sont difficiles à trouver. Sur ce

  1. La même qui a été fondée et dirigée d’abord par l’économiste Blahqui, sous le patronage de MM. Casimir Perier, Ternaux, Chaptal, Jacques Laffite.
  2. On vient précisément de créer à Marseille une chaire de malais, langue maritime par excellence des ports de l’Indo-Chine et de ceux de la Sonde, Singapour, Batavia.