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françaises ; elles exportent de 6,000 à 8,000 balles par an sur 45,000 que comprend en moyenne l’exportation totale. Si l’on ajoute trois ou quatre magasins de détail, l’agence des Messageries et celle du Comptoir d’escompte, on aura le bilan exact de nos établissemens commerciaux. C’est absolument ce qui existait à Shanghaï en 1864[1]. La compagnie des Messageries, dont les magnifiques paquebots continuent à justifier la réputation sur la ligne de l’Indo-Chine et du Japon, n’a pas même au point de vue des affaires de la soie réalisé les prévisions qu’on pouvait formuler en 1864. Des soies qu’elle apporte en France, une dizaine de milliers de balles au plus restent dans les magasins de Marseille et de Lyon ; le surplus ne fait que traverser la France pour rejoindre les marchés anglais.

Le port de Shanghaï lui-même, en-dehors des intérêts français, a vu sa prospérité s’accroître considérablement. Les importations et les exportations y sont arrivées à un chiffre moyen de 560 millions de francs par an. Les importations ne comprennent pourtant qu’un petit nombre d’articles, dont les principaux sont l’opium, les étoffes de laine et de coton, les métaux, les allumettes et le charbon ; les exportations se composent surtout de thé, de soie et d’épices. Au chiffre de ces échanges s’ajoute celui des grandes opérations locales, lignes de steamers, bureaux d’assurances, banques, etc. Le nombre des établissemens commerciaux n’est pas au-dessous de 150. Le port contient généralement au mouillage 80 navires, tant à voiles qu’à vapeur, sur lesquels la France ne compte que trois ou quatre navires à voiles et les steamers des Messageries qui y attendent la malle. Enfin Shanghaï est relié à l’Europe, depuis l’ouverture du canal de Suez, par des départs presque quotidiens de bateaux à vapeur ; d’un autre côté, le télégraphe sous-marin permet aux résidens de recevoir des nouvelles immédiates de leurs correspondans, soit par la voie de l’Inde, soit par la voie de la Russie. Cependant importations, exportations et tonnage ne donnent à notre pays qu’un très faible profit, et, si nous calculions comme les Anglais, pour lesquels une métropole ne doit de protection aux établissemens de ses nationaux à l’étranger que dans la proportion de l’utilité qu’elle en retire, un simple consulat appuyé d’un navire de guerre serait tout ce que la France devrait à son commerce de Shanghaï. Nous avons pourtant trouvé moyen de nous créer dans ce port une responsabilité qui peut, à un moment donné, appeler de notre part une intervention active, et ceci à propos d’un terrain qui ne nous appartient pas, mais sur lequel nous

  1. Voyez la Revue du 15 juin 1864.