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à l’enquête de 1864 confirment ces renseignemens ; d’après une note communiquée en 1867 à l’enquête du Xe groupe de l’exposition universelle, la maison de la Belle Jardinière, qui emploie 1,500 femmes, payait 3 fr. 50 cent, ou 4 francs par jour aux ouvrières d’élite, 2 francs ou 2 fr. 50 c. aux ouvrières inférieures. Plusieurs fabricans considérables nous ont affirmé plus récemment que le salaire des couseuses oscille entre 2 fr. 50 c. et 3 fr. 50 c. Qu’il faille peut-être un peu rabattre de ces chiffres optimistes, dus à des chefs d’industrie ou à leurs représentans, nous ne le contesterons pas. L’on doit néanmoins admettre que dans les industries de couture une bonne ouvrière gagne au minimum 2 francs par jour et le plus souvent davantage ; mais malheur aux déclassées, aux abandonnées, aux ouvrières de la dernière heure, qui se précipitent en toute hâte et sans guide dans l’arène ! elles gagneront à peine un morceau de pain.

La troisième catégorie qu’il convient d’établir, c’est celle des femmes occupées aux travaux de ménage autres que la couture : les blanchisseuses par exemple, les repasseuses, les teinturières, les dégraisseuses. Ici les salaires ont une certaine fixité. Les sept huitièmes des blanchisseuses gagnent 2 fr. ou 2 fr. 50 cent, par jour ; elles ont souvent en outre soit la soupe, soit un verre de vin ou d’eau-de-vie. Les salaires sont à la fois plus élevés et plus variables pour les femmes employées chez les teinturiers et chez les dégraisseurs. Les quatre cinquièmes d’entre elles gagnent 2 francs par jour au moins, la moitié même atteint des salaires de 3 francs ou davantage, c’est là une industrie bien rétribuée, surtout si l’on considère que beaucoup de ces ouvrières qui gagnent moins de 2 francs par jour sont nourries et logées par le patron. Le nombre des femmes de ce groupe peut monter à 12,000.

La quatrième classe d’ouvrières se compose de celles qui sont occupées dans les articles de Paris, dans la bijouterie et les diverses industries de luxe. C’est dans cette classe que les salaires atteignent le plus haut point : pourtant il est très rare d’y rencontrer des ouvrières qui aient un véritable talent, et que l’on puisse considérer comme des artistes. Les femmes n’occupent que les plus bas échelons de ces industries, elles ne font que les ouvrages les plus aisés, qui réclament seulement un peu d’habileté de main, sans qu’une longue éducation, un pénible apprentissage ou un goût exercé soient nécessaires. Aussi, dans ces professions, les salaires des femmes, quoique relativement élevés, n’approchent pas de ceux des hommes. Quelle que soit la spécialisation presque infinie de la production de luxe à Paris, la tâche des femmes, précisément parce qu’elle ne porte que sur la façon la plus grossière à donner aux objets, y est d’une grande uniformité. Une multitude d’ouvrières sont