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qu’ils sont envahis par les chardons et les broussailles. Le produit total des grains alimentaires est estimé à environ 200,000 hectolitres, ce qui donnerait un peu plus d’un hectolitre par habitant. La campagne romaine ne peut donc suffire à nourrir Rome, quoiqu’elle n’ait pas de population agricole propre à entretenir. On importe annuellement pour 2 ou 3 millions de francs de céréales. Pendant la période de la végétation, on met deux bêtes à cornes par trois hectares sur les pâturages des vallées. Les plateaux secs ne nourrissent que des moutons, au nombre de 3 à 4 par hectare. Les vaches donnent très peu de lait, de 3 à 4 litres par jour. Les femelles des buffles en donnent un peu plus, et leur lait est très estimé. Les bœufs pèsent de 300 à 375 kilogrammes, les vaches de 200 à 255. D’après M. Giordano, le nombre total des bêtes à cornes ne dépasse pas 60,000. — 450,000 moutons vivent sur environ 100,000 hectares de pâturages, et donnent un produit de 1,500,000 fr. en laine, et d’environ 400,000 francs pour les peaux. Les bois pourraient donner un grand revenu, car le combustible est cher à Rome, mais ils sont complètement abandonnés et ravagés par la dent des troupeaux. On voit quelques beaux pins parasols (pinus pinea) dans la pineta d’Ostie, et par-ci par-là quelques gros chênes, mais les taillis ne sont guère que des macchie, de grandes broussailles, dont le produit est presque nul.

Les ouvriers qui descendent des Apennins pour faire les travaux agricoles de l’agro romano sont relativement très peu payés. Les hommes d’élite ne touchent que 1 fr. 25 cent, ou 1 fr. 50 cent, par jour. Le foin se coupe à la tâche, au prix de 5 à 6 fr. par hectare. Pour couper le blé on paie de 12 à 15 fr. à l’hectare outre la nourriture ; c’est encore très peu, car le moissonneur ne dépouille que 16 ares par jour, faute d’employer la faux ou, ce qui vaudrait mieux encore, la faucille flamande avec le crochet.

La campagne romaine, quoique consacrée en grande partie au bétail, ne suffit pas à fournir Rome de viande. Il faut importer des bœufs de l’Ombrie et du Val di Chiana. La viande de bœuf se vend sur pied 1 fr. 20 cent. le kilo, et celle de vache 1 franc. Le lait est très cher à Rome, il coûte 45 cent. le litre. Un Jeune cheval sauvage de trois ans vaut de 350 à 400 francs.

Le fisc porte la valeur imposable de l’hectare à 220 francs en moyenne ; mais la valeur vénale est au moins triple. Le prix de location est de 20 à 30 francs. Il a doublé depuis quinze ans. Cet accroissement de la rente est un fait général en Europe : il provient en partie de la dépréciation du numéraire, en partie de l’augmentation générale de la richesse, qui rend la demande des produits du sol plus intense. On estime que le capital d’exploitation d’un mercanto di campagna occupant 2,000 hectares doit être d’environ 210,000 francs. M. Pareto publie un inventaire agricole complet dans tous ses détails.

Ces quelques chiffres suffisent pour donner une idée de la situation