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simple est largement compensée par l’augmentation des soucis et des risques de l’exploitation. Quoi qu’il en soit, les grandes compagnies devancent en général le moment où il serait indispensable de poser la seconde voie, au moins sur celles des lignes de l’ancien réseau qui en sont encore dépourvues.

La longueur exploitée en 1848 dépassait à peine 2,200 kilomètres. Ce fut seulement à partir de 1854 que les travaux de construction prirent une grande activité ; pendant chacune des deux années 1858 et 1859, plus de 1,200 kilomètres furent livrés à la circulation ; depuis cette époque, la moyenne a atteint près de 900 kilomètres par année. La France était en effet demeurée fort en arrière des principaux pays d’Europe sous le rapport des voies ferrées. Elle avait perdu en longs débats préliminaires et en révolutions le temps que les autres peuples avaient su mieux employer au profit de leur prospérité intérieure, et elle avait beaucoup à faire pour regagner le terrain perdu. Voici quelle était, à la fin de 1869, la situation comparée du réseau des chemins de fer en France et à l’étranger.


Kil. exploités. Kil. exploités.
France 16,954 Belgique 3,052
Grande-Bretagne 24,765 Suède et Norvège. 2,125
Allemagne 17,330 Pays-Bas 1,480
Autriche 8,037 Suisse 1,380
Russie 7,685 Portugal 694
Italie 5,772 Danemark 681
Espagne 5,407 Turquie, Roumanie, Grèce. 524

On comptait ainsi en Europe près de 96,000 kilomètres en exploitation, pour une superficie évaluée à 9,338,000 kilomètres carrés et pour une population de 282 millions d’habitans ; ce qui représentait un peu plus d’un kilomètre de chemin de fer par myriamètre carré, et 340 kilomètres par million d’habitans. La France, avec 3 kilomètres de chemin de fer par myriamètre carré, et 444 kilomètres par million d’habitans, se trouvait dans une condition supérieure à la moyenne.

Sans médire de la statistique, il est permis de rappeler qu’elle se borne à nous donner des chiffres bruts, des calculs tout faits, dont l’exactitude matérielle est inattaquable, mais qui conduiraient parfois à de fausses conclusions, si l’on n’y prenait garde. Par exemple, il n’est pas possible de mesurer le progrès d’un pays, en matière de voies ferrées, au moyen d’une simple règle de proportion entre le nombre de kilomètres exploités et la superficie territoriale. Les superficies sont très dissemblables ; ici, des plaines qui se prêtent à la construction des chemins de fer ; là, des régions mon tueuses que le rail ne saurait gravir. L’étendue, le climat, le nombre et la répartition de la population sont autant d’élémens qui