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878 REVUE DES DEUX MONDES. en déficit. Même sur l’ancien réseau, il existe nombre de lignes dont le produit ne suffirait pas pour payer, en sus des dépenses d’exploitation, un intérêt de 5 1/2 pour 100 au capital.

Prenons pour exemple la compagnie de Lyon. Son ancien réseau se composait, en 1869, de 32 lignes ou sections, mesurant ensemble 3,560 kilomètres, dont la construction a coûté 1 milliard 811 millions, soit 509,000 francs par kilomètre. Sur ces 32 sections, l’on en compte 24, d’une longueur totale de 2,449 kilomètres, qui seraient en déficit. Cette insuffisance est compensée au-delà par les résultats de l’exploitation des 8 autres sections qui, avec un parcours de 1,111 kilomètres, procurent un bénéfice de beaucoup supérieur au chiffre qui serait nécessaire pour payer l’intérêt au capital de premier établissement. Cet excédant est de 65 millions, qui servent à couvrir non-seulement le déficit de 34 millions sur 24 sections de l’ancien réseau, mais encore le déficit de 11 millions sur les 10 sections du nouveau réseau. S’il était porté atteinte aux recettes de la grande ligne de Paris à Marseille, qui produit la presque totalité du bénéfice net, les combinaisons financières sur lesquelles repose la constitution de la compagnie de Lyon seraient détruites. Il en serait de même, à un moindre degré peut-être, pour les autres compagnies. Il ne faut point se lasser de répéter que le nouveau réseau et une partie de l’ancien n’ont pu être construits et ne peuvent continuer à être exploités dans des conditions d’équilibre que grâce aux bénéfices d’un petit nombre de grandes lignes et au crédit que ces bénéfices donnent aux compagnies sous la garantie de l’état. La statistique achève la démonstration. En permettant de décomposer les chiffres généraux et d’examiner ce que chaque ligne, considérée isolément, coûte et rapporte, elle dissipe les illusions dangereuses, rectifie les écarts de la controverse et montre clairement à quel prix et dans quelle mesure il est possible d’engager dans de nouvelles entreprises la fortune publique et les capitaux privés.

La recette kilométrique des chemins de fer français a suivi un mouvement presque continu d’augmentation jusqu’en 1855, année pendant laquelle son chiffre a dépassé 53,000 francs ; puis elle a décru presque régulièrement pour s’abaisser à 43,000 fr. en 1869. De même l’excédant des recettes sur les dépenses de l’exploitation est descendu de 30,900 francs à 23,500 francs. Les premières lignes concédées ont été très productives, les secondes l’ont été moins ; . à mesure que l’on a étendu le réseau primitif, la moyenne générale des recettes et des excédans a diminué, bien que les compagnies, ayant acquis plus d’expérience, aient réalisé des économies dans les dépenses. Voilà le fait qui est connu, et à l’appui duquel il serait inutile de multiplier les chiffres. Cette industrie