Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 103.djvu/649

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelques chances de succès local n’ont même pas réussi. Ainsi on a essayé d’établir à Horta une boulangerie fournissant un pain de meilleure qualité que celui qui est en usage dans cette ville, et l’on a échoué contre l’indifférence et peut-être aussi contre les goûts invétérés de la population. On a importé et installé un outillage mécanique pour la confection des clous, dont il se fait un emploi considérable dans la construction des caisses destinées au transport des oranges. Des droits de douane élevés semblaient assurer une protection efficace à cette fabrication ; mais on avait oublié de tenir compte de la fraude, et au bout de très peu de temps le fondateur du nouvel établissement dut reconnaître qu’il ne pouvait soutenir la concurrence des usines américaines, qui trouvaient le moyen de faire pénétrer leurs produits dans les îles en échappant au paiement des taxes.

Il existe cependant à Fayal quelques petites industries qui témoignent d’une dextérité extraordinaire chez ceux qui les exercent. Les femmes de l’île tissent avec du fil d’agave des dentelles d’une délicatesse extrême, et font en coton des bas à jour qui ont été l’objet d’une récompense à l’exposition de 1867. Pendant plusieurs années ces bas ont joui d’une certaine vogue aux États-Unis ; mais là comme ailleurs la mode change, et en ce moment les pauvres tricoteuses fayalaises chôment. Un autre genre de travail, plus spécial à l’île de Fayal, est la fabrication de petits ouvrages en moelle de figuier. Cette matière, d’un blanc de neige, prend sous l’instrument tranchant les formes les plus variées : on en fait des bouquets d’une finesse exquise, des dessins en relief qui représentent des animaux, des plantes, des navires, des allégories diverses. Les ouvrières occupées à ce métier sont de véritables artistes. Deux d’entre elles ont un jour exécuté sous mes yeux quelques objets, et j’ai été vivement frappé de leur bon goût et plus encore de leur habileté manuelle. Avec un simple rasoir, elles donnaient à la moelle de figuier des surfaces arrondies qui avaient l’éclat et le modelé du marbre de Carrare : tantôt elles le découpaient en lamelles si minces que leur travail aurait fait envie au micrographe le plus exercé. La vannerie de Fayal mérite aussi une mention particulière. Elle fournit au commerce de charmantes petites corbeilles finement tressées et décorées de traits d’un rouge vif.

Dans les autres îles de l’archipel des Açores, aucune industrie locale ne vaut la peine d’être signalée, si l’on excepte toutefois la confection des fleurs en sucrerie, qui a lieu encore dans les couvens de Terceire, et la fabrication des couvertures de lit, qui se fait surtout à Pico et à Florès. Ces couvertures sont formées d’une grande pièce de toile blanche, dans laquelle sont passés,