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CÉRAMIQUE

ANTHROPOLOGIE DES VASES GRECS.

Les principes de l’art décoratif des anciens ont donné lieu à des discussions stériles qui auraient pu devenir fructueuses, si, au lieu d’ouvrir les livres, on avait interrogé les monumens. En jetant un coup d’œil sur la plus modeste collection d’objets antiques, de bijoux, de bronzes, d’ivoires, on est frappé de l’emploi systématique que les artistes d’autrefois faisaient de certaines parties du corps humain ou du corps animal pour donner de la vie aux objets usuels. Cette préoccupation d’animer, de personnifier la nature morte domine toutes les autres. Voyez ce collier d’or décoré d’un masque de Silène, ces pendans d’oreilles représentant un Amour au vol ou Ganymède ravi par l’aigle de Jupiter, cette épingle à cheveux couronnée d’un buste de Vénus ou d’une main ouverte ; l’artiste n’avait-il pas l’intention manifeste de substituer le beau à l’utile, l’esprit à la matière ? Ici ce sont des têtes de cheval ou de mulet ornant les bras d’un siége, là c’est une tête de bélier terminant les cannelures d’un manche de patère, ou une poignée de miroir en forme de pied de chevreuil. S’agit-il d’inventer le motif d’une anse de ciste, on y dresse un groupe de figures aux bras entrelacés ou un acrobate qui fait la culbute. Les poids de la balance, afin d’être plus inviolables, représentent des bustes de divinités ou d’empereurs romains ; des têtes de cygne à l’encolure souple et gracieuse réunissent l’anse au corps du vase, un doigt recourbé remplace le crochet, un mascaron de lion à la gueule béante orne le timon du chariot ou l’orifice de la gouttière du toit.

Dans l’introduction à son catalogue du musée de Berlin, M. Friede-