Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 104.djvu/641

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les complète avec son exactitude ordinaire. Il nous représente l’épouse du margrave Thedi de Vettin comme très ardente à la sédition : elle avait, paraît-il, quelques griefs particuliers contre le jeune roi. La révolte fut réprimée. Les Billung, si puissans, furent réduits à la soumission, et Otton de Nordheim paya sa révolte du prix de son duché de Bavière, qui fut donné à son gendre Welf d’Italie, par lequel s’est propagée en Allemagne la seconde maison des Guelfes, entée par mariage et par adoption sur la première qui venait de s’éteindre, celle des Guelfes carlovingiens d’Altorf. De là sont parties, comme nous l’avons indiqué dans la première partie de ce travail, les deux maisons de même souche, de Hanovre en Allemagne, et d’Esté en Italie.

La royauté de Germanie, quoique victorieuse, resta pourtant très affaiblie, car la révolte avait laissé un levain vivace ; une conspiration nouvelle était près d’éclater, et les moines se mettaient sourdement de la partie, irrités contre le luxe et les concussions des évêques de la cour. Henri, trompé par ses conseils, ne voyait dans les réclamations contre des évêques agréables que la rébellion contre sa personne, continuée sous un autre prétexte. Son inexpérience le conduisit à d’inévitables fautes. Il n’en a pas, à vrai dire, la responsabilité morale, car il avait vingt ans, et Adalbert de Brême était encore en plein crédit. L’archevêque de Mayence excommuniait les récalcitrans, et Annon de Cologne administrait souverainement les affaires. Adalbert n’est mort qu’en 1072, et Annon ne s’est démis qu’en 1073, pour se retirer dans un couvent. Ces dates sont précieuses à recueillir[1]. On ne peut douter qu’Henri ne regardât la cour de Rome comme la secrète instigatrice de ses embarras. Il faisait remonter jusqu’à elle sa tragique aventure du Rhin, et, la légèreté de la jeunesse aidant, les mécontens de la sévérité romaine avaient appui auprès de lui. De son côté, la cour de Rome avait l’œil ouvert sur les dispositions du jeune roi, dont la fierté se développait. Les fauteurs de Cadalous troublaient encore l’Italie, où ce suppôt d’intrigue s’était posé en représentant du droit impérial[2]. Les rapports personnels du jeune roi avec Alexandre II étaient donc fort tendus, et Hildebrand, tout-puissant auprès du pape, se montrait irrité de certaines velléités d’opposition germanique. Les simoniaques et les concubinaires relevaient la tête en Allemagne, et l’autorité

  1. Voyez Mascov, p. 29-31, et l’Art de vérifier les dates, t. III, aux archevêques de Cologne.
  2. Voyez la scène du concile romain, racontée par Saint-Marc, t. III, p. 406, où Cadalous attaqua la légitimité pontificale d’Alexandre II, et où le cardinal Hildebrand s’emporta si vivement contre le pape intrus et contre le droit électoral de l’empire invoqué par ce dernier.