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suivi, les exportations ont été de 929 millions au-dessus des importations. Ce résultat n’était pas mauvais en lui-même, car il nous aidait à sortir d’embarras. Il ranimait le travail, qui eût été complètement paralysé sans le débouché extérieur, et il faisait rentrer le numéraire, dont on a toujours grand besoin dans les momens de crise; mais il n’était certainement pas un signe de richesse. Autrefois, lorsque le crédit ne s’étendait guère au-delà des frontières, qu’on plaçait peu ses capitaux au dehors, la balance du commerce pouvait avoir quelque signification : elle se rapportait presque exclusivement aux relations extérieures, et on pouvait croire qu’elle en indiquait l’état, favorable si les exportations dominaient, défavorable si c’étaient les importations. Il n’en est plus de même aujourd’hui : le pays où les importations dépassent les exportations est au contraire celui qui s’enrichit le plus, car il y a une partie des premières qui constitue un revenu. On ne peut donc tirer aucune conclusion sérieuse pour nous de la balance du commerce en 1872, telle que l’indiquent les tableaux de douane; il est évident que ce commerce nous a donné un avantage bien supérieur à 332 millions. On l’évaluerait plus exactement en prenant la moyenne des profits commerciaux. Cette moyenne doit être au moins de 12 pour 100. A ce compte, le mouvement extérieur et général des affaires ayant dépassé 8 milliards nous aurait procuré un bénéfice d’environ 1 milliard. Si on y ajoute ce qui a pu être réalisé pendant le second semestre de l’année 1871, après le triomphe sur l’insurrection de la commune, et pendant la première moitié de 1873, on arrive en deux ans à 2 milliards de profits, qui se sont traduits par des créances sur le dehors, et que nous avons pu donner aux Prussiens sans rien emprunter au numéraire du pays : ce sont les deux cinquièmes de notre rançon.

Maintenant nous avons fait usage des valeurs étrangères que nous possédions et que notre économie en temps prospère nous avait fait amasser. C’étaient, nous l’avons dit, des rentes sur les divers états, des actions et des obligations d’entreprises industrielles; nous en avons aliéné une partie. Il serait difficile de dire à combien s’est élevée cette aliénation; elle a été surtout faite par des établissemens de crédit, par des banquiers, qui en avaient pour des sommes plus ou moins considérables. Ceux-ci, ayant besoin de se créer des ressources très promptes, et trouvant d’ailleurs à réaliser des bénéfices notables par la comparaison entre le prix de valeurs étrangères, resté à peu près stationnaire, et celui des fonds français, qui était fort en baisse, ceux-ci ont vidé leur portefeuille, et ont dû en vendre au moins pour 1 milliard, qu’on a donné encore aux Prussiens sans faire sortir de numéraire.

Restent 2 milliards pour arriver au solde de l’indemnité ; nous