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notre Dieu, » — il n’a « ni le temps ni le moyen de protester en faveur du vicaire du Christ, et il a l’un et l’autre pour éblouir un prince musulman ! » Alors tout est perdu, il ne reste plus qu’à prier Dieu, « car nous ne sommes pas sauvés, » c’est un politique de première force, M. le général du Temple, qui l’assure ! Les cléricaux à outrance trouvent que le gouvernement manque de foi, les légitimistes trouvent qu’il manque de principes.

Eh non ! sans doute, le gouvernement n’a pas fait et ne fera pas tout ce qu’on lui demande, parce qu’il ne peut pas le faire, parce qu’il a vraiment trop de raison pour n’être pas le premier à comprendre que les résurrections d’ancien régime et les politiques de secte ne sont plus du temps où nous vivons. Non, il ne fera rien de semblable, et rien ne peut mieux le servir aux yeux du pays que d’être déjà accusé de modération par les sauveurs à outrance ; cependant, par son origine, il se sent obligé de négocier avec les partis extrêmes, s’il veut garder l’aile droite de sa majorité. Il se croit tenu à des concessions, à une certaine diplomatie, ne fût-ce que pour paraître faire autrement que M. Thiers, lorsqu’il serait bien plus simple de se dire qu’aujourd’hui comme hier la situation de la France a ses conditions et ses limites, qu’on est arrivé au pouvoir le 24 mai pour imprimer aux affaires une direction un peu plus notoirement conservatrice, mais qu’en définitive la seule politique possible ne doit pas sensiblement différer de celle du dernier gouvernement. On l’a bien vu dans ce qui s’est passé il y a quelques jours au sujet des lois consiiiutionnelles. M. Dufaure, avec une sollicitude toute paternelle, a voulu rappeler ces lois et demander si le moment n’éiait pas venu de nommer une commission parlementaire pour en commencer l’étude. Qu’a répondu M. le duc de Broglie comme vice-président du cabinet ? Il n’a pas paru mettre en doute la nécessité des projets constitutionnels, il s’est rallié simplement à une motion proposant d’ajourner après les vacances la nomination de la commission. Ainsi entre M. Dufaure et M. le duc de Broglie c’est une question d’opportunité et de date, ce n’est pas une question de principe. Les lois constitutionnelles restent au premier rang des travaux nécessaires de l’assemblée, et en effet, à y regarder de près, la question de monarchie se trouvant écartée par le conflit des prétentions dynastiques, ces lois, inspirées par la fameuse commission des trente, préparées par le dernier gouvernement, demeurent l’unique terrain où l’on puisse s’entendre pour donner à la France les institutions les plus essentielles. Le ministère le sent et le comprend sans nul doute ; seulement pourquoi ne pas le dire ?

On a l’air d’être un gouvernement résolu, et on l’est à la vérité quand l’ennemi se montre à découvert, lorsque M. Gambetta commet la maladresse de venir plaider la cause de la dissolution devant une assemblée