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elle devait commencer. Le dernier jour de la discussion, le ministre fit part à la chambre de l’état des forces militaires et navales aux Indes, ainsi que des mesures prises pour les renforcer. Il déclara en même temps qu’on ne pourrait songer à un arrangement que lorsque le drapeau néerlandais serait arboré sur le Kraton d’Atchin. Il dit en terminant que la question de confiance pourrait se décider sur la demande des crédits. Depuis lors la chambre a voté à l’unanimité, pour soutenir la guerre, un crédit spécial de 5 millions 1/2 de florins, et la situation du ministère s’est trouvée ainsi consolidée.

L’état-major hollandais étudie en ce moment toutes les questions qui se rattachent à l’expédition future. On pense qu’elle comprendra environ 10,000 hommes et une forte artillerie. On se propose d’employer des batteries flottantes et des chaloupes canonnières, et de remonter les rivières pour bombarder les principales villes et leurs fortifications. L’intérieur du pays étant très peu connu, on est obligé d’agir avec une grande prudence. On enrôlera 2,500 soldats pour renforcer l’armée coloniale; la marine recevra également des renforts respectables. Des engagemens spéciaux auront lieu pour la durée de la guerre. Les Hollandais rivalisent de patriotisme pour se montrer dignes du renom de leurs aïeux, et feront tous les sacrifices nécessaires au maintien de la domination néerlandaise dans les Indes orientales. Les troupes sont résolues à venger la mort du général Kohler. Il y a quelques jours, le roi des Pays-Bas, se trouvant à Groningue, vit parmi les demandes d’audiences une lettre du père de ce vaillant officier. « Ce n’est point à lui, s’écria le roi, de me faire visite, c’est à moi de lui porter des consolations. » Le souverain se rendit alors auprès du vétéran et lui témoigna les regrets causés à toute l’armée par la mort d’un général qui avait fait noblement son devoir,

La Hollande tout entière comprend qu’il est indispensable d’agir résolument, si l’on ne veut pas que des populations jusqu’ici dociles et soumises soient tentées de s’insurger. La question d’Atchin est pour les Pays-Bas une question essentielle, un intérêt de premier ordre, et il est naturel que toutes les fractions des chambres se soient réunies dans un même sentiment de patriotisme. La fortune publique de la Hollande dépend principalement de ses colonies; l’état en tire la plus forte partie de ses revenus. Les Hollandais font d’ailleurs observer non sans raison que ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement leur prestige, c’est aussi celui de l’Europe, qu’entre les puissances qui possèdent des territoires asiatiques, il existe une sorte de solidarité morale, et que l’affaiblissement de l’une d’entre elles serait pour les autres une diminution d’influence et d’autorité. Un récent télégramme de Calcutta signalait de prétendus pourparlers pacifiques attribués au gouvernement de l’Inde néerlandaise et au sultan d’Atchin. Cette nouvelle a été démentie à la seconde chambre des états-généraux à La Haye par le ministre des co-