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entier dans un bassin de nature argileuse ou granitique aurait des crues subites et formidables après les pluies, et serait à sec le reste de l’année; dans un terrain spongieux, tel que la craie blanche, il ne ressentirait guère l’influence des pluies, mais il débiterait très peu d’eau en toute saison.

Avant d’étudier avec plus de détails le régime de chacune de ces rivières, il est nécessaire de bien se rendre compte de l’influence que la nature du sol exerce sur les sources, puisque ce sont les sources qui alimentent les grands cours d’eau. M. Belgrand résume les résultats de ses observations en deux axiomes dont il est facile de comprendre la raison, outre que chacun peut en vérifier l’exactitude en quelque pays que ce soit. Lorsqu’un terrain est imperméable, il est sillonné par de nombreux ruisseaux qui sont le plus souvent éphémères. Quant au contraire le terrain est absorbant, les ruisseaux sont rares et ne se trouvent qu’au fond des grandes vallées; par compensation, ils ne tarissent guère. Examinons comment se comportent sous ce rapport les diverses couches géologiques dont il a été question.

Le Morvan, contrée granitique où la roche imperméable est recouverte d’une légère couche de détritus, recèle une quantité innombrable de petites sources qui se montrent au jour partout, à flanc de coteau aussi bien que sur le thalweg des vallées. C’est au surplus la région la plus pluvieuse du bassin; la hauteur annuelle de la pluie varie, suivant l’altitude, de 1 mètre à 1m,80. Les filets d’eau, qui bondissent en cascades dans chaque pli de ce terrain accidenté, tarissent rarement même dans la saison sèche. Dans la saison humide, ils se gonflent après chaque averse, deviennent des torrens, et déterminent des crues subites dans les rivières qu’ils alimentent; mais ces crues sont de courte durée.

Dans le lias, qui n’est pas moins imperméable, les ruisseaux ont cependant un régime différent, parce que le sol est moins accidenté. Les eaux courantes ne sont jamais limpides, même en temps de sécheresse, car le terrain friable se laisse ronger sans résistance. Cette riche contrée, quelquefois ravagée par les torrens après les grandes pluies, n’a pas même dans les étés ordinaires assez d’eau pour l’alimentation du bétail. Les sources sont rares et toujours peu abondantes; toutefois, sur le bord occidental de cette zone, à l’endroit où le sol se relève et le lias disparaît sous l’oolithe, règne un cordon de belles sources, les villages se rapprochent les uns des autres, les prairies montent jusqu’au pied des rochers, la végétation devient vigoureuse.

Les terrains oolithiques ne sont pas d’une composition uniforme; les géologues y distinguent sept ou huit couches différentes, les unes calcaires et tout à fait perméables, les autres marneuses et mieux