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la Basse-Seine. En l’état actuel, les petites rivières qui en sortent sont des cours d’eau tranquilles, bien alimentés en été par des nappes souterraines que retiennent à divers niveaux les couches argileuses du terrain tertiaire. Ces nappes affleurent aussi sur les coteaux des environs de Paris, à Brunoy, Meudon, Montmorency, et partout elles donnent naissance à des sources fraîches et pérennes. C’est à ce niveau qu’ont été bâties tant de maisons de campagne entourées de verdure, tandis que les plateaux plus élevés sont secs et dénudés. Il est peu de pays au monde qui puissent être comparés sous ce rapport à la banlieue de Paris.

Ne s’expliquera-t-on pas maintenant les allures en apparence capricieuses, au fond bien réglées, des diverses rivières qui parcourent le bassin de la Seine? Voici l’Yonne d’abord. Elle prend sa source dans les montagnes granitiques du Morvan, y reçoit trois affluens principaux, la Cure, le Cousin et le Serein, qui se transforment en torrens après les pluies. Le lias en grossit encore le cours, puis elle traverse les terrains oolithiques sans beaucoup modifier son volume, si ce n’est quand elle reçoit l’Armançon, qui sort aussi du lias; elle arrive à Montereau, tantôt presque tarie, tantôt avec des crues formidables. Par bonheur, le Morvan a peu d’étendue, ce qui restreint le volume des eaux qu’il déverse dans la vallée, et en outre il est fort rare que toutes ces rivières grossissent le même jour. La crue de l’Yonne et de ses affluens supérieurs ne coïncide pas d’habitude avec celle de l’Armançon. Si par hasard cela arrive, l’inondation prend un caractère formidable.

La Seine et l’Aube, qui rejoignent l’Yonne à Montereau, ont un régime bien différent. La Seine est à sa naissance, dans le terrain jurassique, un des plus petits ruisseaux de son bassin. C’est sur le territoire de Saint-Germain-la-Feuille, dans la Côte-d’Or, que se trouve la source regardée bien à tort comme la tête de notre petit fleuve. Les Romains y avaient érigé des constructions considérables, dont on a déterré les débris. Était-ce un hommage à quelque divinité des eaux? La ville de Paris a relevé en partie ces ruines et a fait renfermer la source dans un bassin entouré de statues, quoiqu’en réalité il n’y ait là qu’une des plus modestes origines de ce grand cours d’eau. Il existe 25 ruisseaux qui, sortis de terre dans une zone assez étroite et convergeant tous vers le lit de la Seine, pourraient avec des titres presque égaux se disputer le même honneur. Puis notre fleuve traverse l’oolithe ; il atteint les argiles tégulines où deux petits affluens à crues torrentielles, l’Hozain et la Barse, lui versent leur tribut; il coupe la craie sur un long parcours, reçoit l’Aube, qui s’alimente en des terrains de même nature, et arrive enfin au confluent de Montereau. Sauf la bande étroite des terrains crétacés inférieurs, il ne sert d’émissaire qu’à des sols per-