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reconnaissance d’un royaume de Bohême pourvu des mêmes privilèges que le royaume de Hongrie. Cette attitude découragea l’empereur, le ministère Hohenwart s’étant retiré au mois d’octobre 1871, le souverain adressait à la diète de Prague un second rescrit, daté du 30 octobre, dans lequel il déclarait que les lois faites sur le traitement des affaires communes et sur les rapports mutuels des deux moitiés de l’empire avaient acquis une force légale pour toute la monarchie, et ne pouvaient être modifiées que de la manière indiquée dans cet accord. En même temps, il engageait de nouveau la diète de Prague à envoyer ses représentans au Reichsrath de Vienne, « afin de contribuer à la grande œuvre de la réconciliation et de donner la preuve de sentimens fraternels pour tous les peuples de l’empire. » Ce langage produisit une vive émotion à Prague ; M. Rieger et le comte Clam Martiniz rédigèrent un mémorandum où ils soutenaient que le second rescrit n’était pas en harmonie avec le premier, qu’il s’écartait de la base du projet de compromis, et ils déclarèrent que la nation bohème maintiendrait son point de vue « avec l’âpre ténacité d’autrefois. » Le 6 novembre 1871, la diète vota une résolution affirmant que la position constitutionnelle du royaume ne pouvait être réglée que par use assemblée légale et le roi légitime ; en conséquence, elle refusait d’envoyer des députés au Reichsrath et protestait contre les décisions que prendrait ce parlement.

Lorsque le Reichsrath s’assembla au commencement de 1872, les députés bohèmes et moraves s’abstinrent d’y venir siéger. Ce qu’il y a de curieux à remarquer, c’est que les fédéralistes auraient eu la majorité au Reichsrath, si tous les groupes dont il se compose avaient consenti à venir combattre le parti allemand sur le terrain constitutionnel ; mais l’esprit de système qui anime les Tchèques de Bohême, leur attachement opiniâtre aux doctrines du droit. historique, développées par MM. Rieger et Palaçki, les empêchent de céder à des considérations de tactique parlementaire. Un instant, le gouvernement craignit que le Reichsrath ne réunît pas le nombre de 100 députés nécessaire pour que les délibérations pussent avoir lieu légalement. Cette appréhension ne se réalisa point, et environ 125 députés parurent dans la salle des séances. Depuis ce temps, le parti national ou parti tchèque continua énergiquement sa résistance systématique. La diète de Prague, ayant été dissoute, fut remplacée au mois de mai par une nouvelle diète où le ministère Auersperg et le parti centraliste se trouvèrent avoir la majorité ; mais c’est là une victoire dont il ne faudrait pas abuser. On sait que c’est par curies que se font les votes pour les diètes cisleithanes ; or c’est la catégorie des grands propriétaires allemands, ce n’est pas la majorité numérique de l’ensemble des populations qui décida du résultat des élections en Bohême. Les Tchèques, en refusant de siéger soit à