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se montrer trop heureux d’accepter la faveur que le voudrai bien leur accorder. Voici mes intentions :

« Le colonel Fabvier gardera ses armes et pourra se retirer librement en emportant ses bagages. Pareille faculté sera accordée aux troupes de la garnison aussitôt qu’elles auront déposé les armes. Ceux des soldats, sujets du grand-seigneur, qui voudraient entrer au service de sa hautesse, seront admis dans l’armée du séraskier, payés et traités comme les soldats du corps dans lequel ils seront incorporés. »

M. de Reverseaux se chargea d’aller, avec un officier du pacha, porter cet ultimatum au colonel Fabvier. À quatre heures et demie, il était de retour. Quelle fut la surprise du commandant Le Blanc en lisant la réponse que lui apportait le commandant de la Pomone ! « Vous êtes dans l’erreur, écrivait le colonel Fabvier. Je ne commande pas ici ; je n’y suis que par accident. Je transmets votre lettre aux chefs de l’Acropole. » Cette défaite, au premier abord étrange, ne laissa pas de causer quelque humeur au pacha. « Comment, dit-il au capitaine Le Blanc, vous vous chargez de traiter pour le chef de l’Acropole, et vous ne savez même pas quel est ce chef ? » Le commandant de la Junon avait un moyen facile d’expliquer sa méprise. Il mit sous les yeux du pacha une copie de la lettre écrite par le général Church à Fabvier. Le 12 mai au matin, le généralissime réparait son erreur. Il s’adressait « au commandant et autres chefs des troupes grecques de l’Acropolis. » J’ai la traduction officielle de cette curieuse pièce sous les yeux. « Plusieurs personnes souffrantes, disait le général, se trouvent renfermées dans l’Acropole : il y a là également des monumens de l’ancienne Grèce chers au monde civilisé ; je désire les sauver de la destruction. je vous ordonne en conséquence d’accepter la capitulation ci-incluse. Le commandant de la Junon a pris toutes les mesures nécessaires pour votre sûreté. » Cette fois ce fut le lieutenant de vaisseau Lavaud, second de la Junon, qui fut dépêché vers la citadelle. Il revint de sa mission avec une réponse moins satisfaisante encore que celle obtenue la veille. Les capitaines grecs Nicolas Kriezotis, Statis Katzicoyani, Mamouri, Emorphopoulo, Jeronimo Foucas, Mitros Lekas, Blakopoulo, Sakharitzas, déclaraient au commandant Le Blanc « qu’ils le remerciaient beaucoup de la peine qu’il s’était donnée pour eux. » — « Il n’y a point ici, disaient-ils, de sujets du grand-seigneur, ainsi que le porte le projet de capitulation que vous nous avez envoyé ; il n’y a que des Hellènes déterminés à mourir ou à vivre libres. Si Kiutahié (c’est ainsi que les Grecs appelaient le vizir Reschid naguère pacha de Kiutahia) veut nos armes, qu’il vienne les prendre ! »

Transmise au pacha, cette fière réponse devait naturellement