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routes étaient si peu sûres, où les larrons poussaient leurs attaques jusqu’aux portes mêmes des grandes cités. Le tribunal de ces grands-officiers, en étendant son ressort aux attentats les plus dangereux pour la sécurité publique, mettait ainsi les parties les moins protégées du territoire sous la jurisprudence de ce que nous appellerions aujourd’hui l’état de siège. Prévôts-généraux et prévôts particuliers des maréchaux, institués plus tard à la place de l’unique délégué existant à l’origine, constituaient avec leurs lieutenans de véritables cours où l’on jugeait sans appel, et, comme on disait, prévôtalement, d’une façon assez sommaire, car il s’agissait ordinairement de flagrant délit, de guet-apens, de vol sur les grands chemins, et de ces cas appelés royaux dont les officiers de la maréchaussée avaient la connaissance concurremment avec les baillis, auxquels appartenait toutefois la prévention. Ceux-ci ne pouvaient juger sans appel, et les prévôts des maréchaux, dans l’intérêt de la police, se trouvaient de la sorte investis d’une puissance égale à celle des sièges présidiaux, lesquels pouvaient leur enlever la connaissance de l’affaire, s’ils avaient décrété avant eux ou le même jour. Ainsi par la nature de ses fonctions, la maréchaussée eut pour mission, tout en arrêtant les coupables, de faire exécuter les décrets et mandemens de la justice. Il s’ensuivit que ce corps ne releva plus des maréchaux que d’une manière nominale, et, comme notre gendarmerie, il fut subordonné à la fois à l’autorité militaire et à l’autorité judiciaire. Les emplois de prévôts provinciaux ayant été érigés en titre d’offices, les commandans des maréchaussées devinrent des officiers du roi. Le tribunal qui représentait le connétable dans l’exercice de sa juridiction civile et administrative perdait aussi une grande partie de son importance. Il conserva le nom de connétablie, même après que la charge de connétable eût été abolie. Composé d’abord des maréchaux qui y siégeaient sous la présidence fictive du connétable, il finit par n’être plus formé que des juges commis en leur place par les maréchaux, et en dernière analyse par ne plus dépendre de ceux dont ils étaient les représentans. La connétablie fut placée dans le ressort immédiat du parlement, et les maréchaux n’y eurent plus qu’un siège honorifique. La compétence de ce tribunal alla diminuant, et l’institution des conseils de guerre, la subordination de la justice militaire aux intendans en restreignirent singulièrement l’action. Au siècle dernier, les maréchaux ne jugeaient plus que les questions de point d’honneur, dont le tribunal se tenait à la table de marbre.

Les attributions attachées au grand office d’amiral lui donnèrent une. juridiction propre, comme cela s’était produit pour les principales charges de la couronne. Dans les ports, les contestations nées des conventions qu’entraînait le commerce maritime paraissent avoir