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le cours inférieur de l’Euphrate et du Tigre, fondèrent l’empire de Chaldée, avant que la race sémitique d’Assur les subjuguât à leur tour. Ils ont donné aux Sémites, et par les Sémites aux Aryens, les élémens premiers de toute culture industrielle et scientifique. Ce sont eux qui dans la Mésopotamie, comme en Arménie et chez les Susiens, ont introduit le système de l’écriture cunéiforme. Les lois constitutives de la société babylonienne, les formules sacrées, les livres de science ou de magie, rédigés dans l’idiome des Touraniens, demeurèrent toujours la chose de la caste sacerdotale et savante des Chaldéens. Aussi haut qu’on remonte dans le passé, les Mosches, les Tibarènes et les Chaldéens semblent avoir les premiers excellé dans l’exploitation des mines et le travail des métaux. Aujourd’hui encore les montagnes de la Colchide renferment d’inépuisables mines de cuivre. M. Alfred Maury, en son savant mémoire sur les Gètes, a remarqué que c’est en partie aux armes de métal que les Touraniens ont dû leurs victoires sur les Couschites : ceux-ci n’avaient pour se défendre que des massues de bois, des flèches de roseau, des armes en pierre et en os. Ézéchiel, on l’a vu, parle des vases d’airain que Mosoch et Tubal envoyaient à Tyr. Qu’est-ce enfin que Tubal-Caïn, l’inventeur de l’art de forger le fer et l’airain, sinon une personnification de Tubal ?

Comment la Cappadoce et le Pont sont-ils devenus des pays de langue araméenne, c’est-à-dire d’une langue très voisine du phénicien et de l’hébreu ? L’étude des monumens numismatiques de l’Asie-Mineure démontre qu’au VIe siècle avant notre ère et sans doute auparavant, non-seulement en Cilicie, mais encore dans la Cappadoce et la Paphlagonie, on parlait un idiome sémitique. « Ce n’est pas sans raison, dit M. Waddington, que les habitans de la Cappadoce étaient appelés Leuco-Syri ou Syriens blancs par les Grecs. » Une ville d’un nom purement sémitique, Gazor, qui rappelle l’ancienne capitale des Chananéens de la Palestine, se trouvait sur l’Iris. Au temps de Strabon, Gazor n’était plus qu’une « ville antique et déserte ; » mais durant des siècles elle doit avoir servi de résidence aux souverains du pays ; elle conserva son atelier monétaire sous les derniers rois du Pont. Dans les chancelleries de Darius, si le grec était la langue officielle pour les cités des côtes de l’Asie-Mineure, l’araméen était celle de la Cappadoce, de la Cilicie, de la Syrie et de la Palestine. A part la Phénicie et ses colonies, l’influence considérable de l’araméen, devenu plus tard, sous le nom de syriaque, l’idiome du sémitisme chrétien, se retrouve partout sur les monumens, en Mésopotamie, en Asie-Mineure, en Égypte.

Sous l’influence des religions, de l’art et de la civilisation des Mèdes et des Perses, surtout à l’époque de la domination des