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qu’ils soient, ces personnages ne pouvaient prendre rang dans le parti national-libéral : ils ont donc formé une fraction séparée, mais leurs votes se rencontrent souvent dans l’urne avec ceux de MM. Bennigsen et Lasker. Presque tous, ils ont vécu de la vie parlementaire, qui est très active dans les royaumes du sud ; habitués à l’exercice des libertés nécessaires, ils les défendraient au besoin : de là l’épithète de libéraux qu’ils ont prise. Le parti de l’empire l’a au contraire rejetée. Sur les trente-sept membres dont il se compose, sept portent le titre de prince, onze celui de comte, quatre celui de baron ; ajoutez huit nobles : il reste sept roturiers. Il est naturel qu’on se défie en si noble compagnie du libéralisme moderne. Trente sont Prussiens, attachés par conséquent à l’empire fondé par les armes des Hohenzollern, mais ils nourrissent au fond du cœur des sentimens particularistes, et voient d’un œil inquiet l’aventureux chancelier imposer à la Prusse à l’aide de son parlement des lois que n’eût jamais votées la chambre des seigneurs. Cette inquiétude est plus vive encore dans la troisième fraction de la droite, qui s’appelle tout simplement le parti conservateur. Celle-ci compte un peu plus de 50 membres, parmi lesquels 4 roturiers seulement ; mais le plus remarquable, c’est que 49 d’entre eux sont Prussiens, mandataires des plus vieilles provinces de la monarchie. C’est le parti féodal, celui auquel appartenait jadis le chancelier, celui qui tenait pour les corporations contre la liberté industrielle, pour les privilèges contre l’égalité, pour le roi contre « cette feuille de papier » qu’on appelle une constitution, celui, qui respectait l’autorité légitime de l’Autriche dans la confédération, qui envoyait en 1860 un bouclier en vermeil au roi de Naples bombardé dans Gaëte. Ces féodaux ont vu supprimer les corporations, atteindre les privilèges, développer le parlementarisme, chasser l’Autriche de l’Allemagne avec l’aide de Victor-Emmanuel, roi d’Italie. Ils voient leur ancien chef, M. de Bismarck, s’entourer des hommes qu’il a combattus en 1848 pendant la période révolutionnaire, en 1864 au temps du conflit, s’appuyer sur ces révoltés d’autrefois, gouverner avec des majorités où se trouvent des voix de condamnés à mort. On leur dit que le roi approuve cette métamorphose singulière : ils se soumettent, comme toujours, à la volonté du roi ; mais ils défendent du mieux qu’ils peuvent les vieilles institutions de cette Prusse, dont ils sont les plus vaillans soldats. Ils ont donné la présidence d’honneur au plus illustre de leurs membres, M. le feld-maréchal comte de Moltke, qui a pris ainsi l’ancienne place de. M. de Bismarck.

Au-dessus des sièges du parti libéral, de l’empire, je remarque des bancs encore vides, bien que la séance soit sur le point de commencer : ce sont ceux des Polonais. Ils sont 13, qui ne siègent