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jamais éclipser, les palais impériaux et les casernes qui lui forment une ceinture, les grands hôtels des Rings, les salles de spectacle, le pont monumental qui termine Léopoldstadt, — tout ce qui est voisin ne se montre que sur une échelle réduite; le grand spectacle est plus loin. C’est le Danube, qu’on voit si peu tant qu’on reste dans la ville, et qui d’ici se dégage dans la splendeur de son cours. Ce sont les îles qu’il baigne et qui ressemblent à autant d’oasis, les plaines de cet archiduché qui reste à l’Autriche comme le dernier débris de sa prépondérance allemande, la chaîne de montagnes qui se déploie dans les premiers horizons, et que domine le Kahlenberg, tout ce paysage enfin qui forme un cadre si bien assorti à cette ville d’élégances et de plaisirs. C’est là du moins une suite de panoramas naturels dont l’effet reste gravé dans la mémoire; on en sort véritablement ébloui et inondé de lumière. La descente se fait comme la montée, presque sans fatigue et dans les mêmes conditions de sécurité.

Autour de cette partie de l’exposition, qui fait corps de bâtiment et qui, paraît-il, sera conservée, il régnait un cordon irrégulier d’annexés, on pourrait dire de satellites, distribués soit aux abords, soit dans les espaces restés libres entre le palais et la grande galerie des machines, qui s’étend parallèlement. Cette portion des constructions était le domaine de la fantaisie, et probablement il a déjà disparu. Les arts et la grande industrie s’en étaient découpé des fragmens pour y former des expositions particulières à côté et à l’appui de l’exposition générale. Il suffit d’en citer quelques-unes comme souvenir. C’était par exemple un journal de Vienne, la Nouvelle Presse libre, qui dans un élégant pavillon avait réuni, comme appel à la curiosité, ses principaux instrumens de travail, une magnifique presse et quelques ateliers de composition. A un moment de la journée, le tirage de la feuille du jour commençait en présence d’un public nombreux et qui circulait pendant des heures entières autour de l’enceinte. Plusieurs établissemens de premier ordre avaient suivi cet exemple pour une exhibition mieux ordonnée et plus méthodique de leurs produits, l’usine d’Essen (en Westphalie) pour ses canons Krupp, devenus fameux dans la dernière guerre, les usines de Sheffield, qui de leur côté montraient des canons non moins merveilleux par leur puissance et le poli de leur acier, enfin la Suède, qui, avec des prétentions plus modestes, n’en offrait pas moins la meilleure trempe de métal que l’on connaisse dans le monde. Non loin de là figurait une société de navigation qui a fait à la fois l’orgueil de l’Au- triche et la fortune de ses actionnaires, la Société du Lloyd, dont le siège est à Trieste. Son matériel, reproduit en miniature, présentait une suite de tableaux curieux, le bâtiment à vapeur d’abord avec ses