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pour l’empire autrichien, le seul port marchand et le seul port de guerre qu’il ait. C’est à Trieste qu’est le siège de la flotte du Lloyd, chargée du service des passagers et des marchandises entre l’Europe et l’extrême Orient; c’est de Trieste également qu’est partie la flotte de guerre qui infligea aux Italiens le désastre de Lissa : il devait donc y avoir et il y a eu à l’exposition du Prater une place réservée pour Trieste et pour sa marine, figurée dans quelques échantillons réduits et jugée à sa valeur dans un ou deux tableaux statistiques. Rien de plus précis et de plus concluant. Pour savoir ce que vaut et peut Trieste, il suffit d’avoir visité ses chantiers et aperçu le long des quais les bâtimens qui en sortent. Tandis que Marseille, en fait d’armemens battant notre pavillon, en est presque réduit à des nefs de cabotage, Trieste compte à flot 30 ou 40 navires au moins de 700 à 800 tonneaux de jauge. Quant aux marins, il n’en est guère de meilleurs : dans le factage maritime, on n’en trouverait pas de plus exacts, de plus fidèles, de plus sobres, de plus rangés; dans les combats, ils font bonne figure, et ils l’ont bien prouvé sous Tégethoff. De toutes les façons, l’empire d’Autriche a tout lieu d’être fier de Trieste et d’y montrer avec un certain orgueil un reflet puissant de sa richesse et de sa force. La Prusse, malgré ses ambitions, n’en a pas encore l’équivalent.

Pour en revenir à la solennité qui, pendant six mois et plus, a tenu Vienne en haleine, c’est le moment de se demander quelles conséquences elle a eues en réalité, et de s’en rendre compte avec un sentiment de bienveillance sans trop se presser de conclure. On peut sans doute, et c’est le cas pour bien des gens, trancher là-dessus et dire sans phrases que l’exposition était une spéculation, et que cette spéculation a mal tourné. C’est tomber dans l’excès à propos d’un sujet qui n’en comporte pas et où il y a à se défendre aussi bien d’un dénigrement trop fort que d’un enthousiasme trop vif. L’exposition de Vienne a été ce qu’elle pouvait être, rien de plus, rien de moins, et, quant aux résultats définitifs, les principaux intéressés eux-mêmes ne savent pas encore au juste ce qu’il en est. La liquidation commence, et il s’écoulera du temps avant que les chiffres en aient été dégagés; tout ce qu’on a dit jusqu’à présent ne repose que sur des conjectures. Ce n’est pas d’ailleurs une opération aussi simple qu’on le croit communément ; d’un côté tant à la recette, de l’autre tant à la dépense, reste tant. La partie engagée était moins élémentaire. A côté de l’acquisition du sol et de la construction des bâtimens, il existait d’autres opérations qui devaient faire équilibre à la dépense, y apporter du moins des compensations. Ces opérations ne sont point encore bien définies, ni les chances bien fixées. Telle était l’appropriation des galeries construites à une suite d’entrepôts qu’on