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pouvoir comprendre que des vignes dérivées du vitis œstivalis ; il plaçait à tort dans ce groupe le clinton, et du fait que le catawba et l’isabelle avaient succombé dans ses cultures il croyait pouvoir induire que tous les dérivés de labrusca seraient voués au même sort. Mieux renseigné sur les vrais noms des cépages, mieux instruit par des observations faites en grand dans le Missouri, M. Riley rectifia sur plusieurs points ces données, et, distinguant dans les variétés l’aptitude à nourrir le phylloxéra sur les feuilles ou à l’avoir sur les racines, il éclairait singulièrement cette question de la résistance relative des cépages. De ses observations et des miennes peut résulter dès à présent une sorte d’échelle de résistance des divers cépages, dans laquelle nous passerons des plus réfractaires à ceux qui le sont le moins. L’herbemont, le cunningham viennent en tête, sur la foi de Riley et surtout parce que, dans les expériences faites à Montpellier, leurs boutures, cultivées pendant deux ans entre des vignes d’Europe phylloxérées, ont mieux poussé que les concord eux-mêmes placés dans les mêmes conditions. D’ailleurs l’excellente qualité du vin et l’absence de goût de cassis recommandent ces cépages pour la culture directe, sans greffage des nôtres, en Europe. Le concord est le plant rustique et vigoureux par excellence ; on recommande au même titre l’hartford prolific, remarquable par l’abondance, la précocité de ses raisins, l’ives seedling, qui dans les cultures de l’Ohio prend la tête pour la production des vins rouges, le martha, raisin blanc qui, mêlé au maxatawney, donne l’un des meilleurs vins blancs de l’Amérique. Toutes ces variétés sont résistantes, bien qu’elles appartiennent au groupe des labrusca.

Cette qualité de résistance appartient également à plusieurs variétés dérivées des types sauvages cordifolia et riparia. En tête, je mettrais peut-être le norton’s virginia, que j’ai vu à Webster, dans le Missouri, former un carré de vigne luxuriant et fertile juste à côté d’un carré de catawba du même âge en train de périr. Le clinton est un cépage populaire, plein de vigueur, relativement fertile, bien que ses raisins soient petits, peu juteux et légèrement framboisés ; il se couvre parfois de galles phylloxériennes sans que ces déformations groupées en général au sommet des pampres compromettent la récolte ou même la santé du cep : seulement il faudra soigneusement enlever, dans l’intérêt des ceps voisins, ces nichées de phylloxéras. Le taylor, cépage blanc, donne un vin très délicat : on le dit malheureusement peu fertile, mais ses rameaux rampans ont une grande puissance de végétation.

Tous ces cépages et d’autres que j’omets ne sont pas, comme on pourrait le croire, à l’abri des attaques du phylloxéra : tous au con-