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après maints essais infructueux dans les pays où le mouvement diurne de la mer n’a qu’une amplitude peu considérable, les Anglais les possédèrent dès le début de leurs armemens. Ils y construisirent leurs navires, ils les y firent entrer pour les caréner. Le roi d’Angleterre avait établi ses arsenaux dans les ports de Woolwich, de Deptford, de Portsmouth et de Chatam; sa flotte en 1671 se composait de cent trente-deux vaisseaux montés par 29,000 hommes. Les forêts royales du comté de Sussex et de la Cornouailles lui fournissaient du chêne en abondance. Il faisait venir de Suède ses canons; les bois de sapin, le goudron, et les mâtures de Hambourg ou de Lubeck.

Toutes les forces navales de l’Angleterre étaient sous les ordres du grand-amiral. Le navy-office ou cour d’amirauté présidait à la construction, au radoub, à l’armement et à l’équipement de la flotte, mais c’était le grand-amiral qui nommait les capitaines et faisait, au moment d’entrer en campagne, expédier par le secrétaire du navy-office les brevets de commandement. Ces commissions étaient essentiellement temporaires; la Hollande fut pendant bien des années la seule puissance navale qui crût nécessaire et juste de conserver en temps de paix des capitaines pensionnés sur les fonds de l’état.

L’état-major d’un vaisseau anglais de premier rang comprenait, vers la fin du XVIIe siècle, outre le capitaine, trois lieutenans, un master, un pilote, trois aides-pilotes, trois aides-masters et huit midshipmen. Pendant plus de deux siècles, les fonctions de ces officiers sont restées à peu de chose près ce qu’elles étaient au début de la marine anglaise. Sous Charles II, comme plus tard sous les princes de la maison de Hanovre, le capitaine était avant tout le commandant militaire du navire. Le pilote dirigeait la route, le master se chargeait de la manœuvre. Un agent spécial, le purser, surveillait la distribution des vivres, qui lui étaient fournis, non pas, comme en Hollande, par le capitaine, mais par un munitionnaire-général.

Composés pour les deux tiers de matelots, pour l’autre tiers de soldats, les équipages se recrutaient autant que possible par des enrôlemens volontaires. Cependant, en cas d’urgence, le capitaine recevait de l’amiral un warrant, en vertu duquel il pouvait faire embarquer sur son vaisseau tous les marins, tous les gens sans aveu qu’il parviendrait à saisir. Il y avait sur la flotte britannique trois classes de matelots : la première classe touchait 2ù shillings, la seconde 18, la troisième 14. Les mousses ne recevaient pas de paie. On citait déjà les Anglais comme les meilleurs canonniers qui fussent au monde. « Un canonnier anglais, disait-on, pourra tirer cinq coups de canon dans le temps qu’un Français ou un Hollandais mettrait à en tirer quatre. » On n’embarquait cependant que deux