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contre toute concurrence vers le nord, c’est dans le sud, à l’extrémité du réseau hongrois et à l’est du côté de la Roumanie, que la Société autrichienne doit aujourd’hui poursuivre le complément de son réseau et s’assurer le trafic international qu’on ne saurait lui disputer au nom des intérêts politiques ou stratégiques qu’elle peut d’ailleurs servir mieux que tout autre.

Quand on examine, en regard des dépenses faites, les revenus de chacun des réseaux de la Société autrichienne, on est frappé d’une contradiction singulière. Les lignes du nord qui traversent la Bohême, le pays le plus peuplé, le plus fertile, voisin des provinces les plus industrieuses de l’Allemagne, ont progressé beaucoup moins que celles de la Hongrie. Sur une période de dix ans, en prenant pour point de départ l’année 1860, on voit que le réseau du nord avait donné cette année 9 millions de florins de recette : en 1867, après l’établissement du dualisme, la recette dépasse 11 millions, et en 1870 approche de 14. Le produit du réseau hongrois au contraire dépasse 8 millions en 1860, 13 en 1867 et 16 millions en 1870. Dans le premier cas, l’augmentation n’est que d’environ 50 pour 100; elle est supérieure à 100 pour 100 dans le second. — Pour la petite ligne de Vienne à Raab, les recettes restent stagnantes.

La principale cause de cette différence tient sans doute à ce que les lignes de Hongrie servent à la fois à un trafic local et à un trafic international, la Staats-Bahn étant encore la seule voie pour diriger vers le nord les produits des provinces danubiennes et de l’Orient. Il ne faut pas toutefois considérer comme de peu d’importance le trafic local de la Hongrie. Cette vaste plaine de terre d’alluvion, où les populations sont agglomérées dans des centres séparés par de grandes distances, qui semble par ce fait médiocrement peuplée, où les bois sont rares, où les routes existent à peine, faute de pierres pour les construire, est un véritable grenier d’abondance. Dans les années fertiles, le trafic des céréales est énorme, et les recettes des chemins de fer, qui constituent le principal mode de transport, s’élèvent en proportion. La variation des récoltes entraîne forcément la variation du produit des lignes de fer. C’est pour assurer un revenu à peu près stable que l’administration de la société a prélevé sur les bénéfices annuels des réserves hors de proportion avec ce qui se fait dans aucune autre entreprise de ce genre et qui dépassent aujourd’hui le chiffre de 30 millions de francs.

Le produit des lignes de Bohême ne s’est pas accru comme celui des lignes de Hongrie, mais il partait d’un chiffre plus fort, et il reste encore plus élevé. « En 1872, il a été de 198,000 florins par mille contre 152,000 en Hongrie. » On doit trouver ce résultat d’autant plus important que, dans son réseau du nord, la Staats-Bahn a cessé de jouer le rôle important et exclusif qui lui avait été réservé